Ah, Afrique ! Toujours imprévisible lorsqu'il s'agit de dévoiler le revers de sa médaille comme cette histoire de supposé arrangement entre les Eléphants de Côte d'Ivoire et les Aigles du Mali pour le compte du match du groupe B qui les opposait, hier, dans le cadre de la dernière journée des poules de la CAN-2008. Les mauvaises langues, relayées par quelques organes de presse et par une opinion souvent très facilement manipulable, ont fini par arriver aux joueurs des deux camps et leurs entraîneurs respectifs qui se sont soudainement mis à entonner le même refrain : «On jouera honnêtement pour gagner, c'est ridicule de penser qu'à ce niveau de la compétition et entre deux grandes nations qui ont une image à préserver on puisse arranger un match au détriment d'une autre équipe». Un avis dont n'étaient pas très convaincus les Nigérians qui ont joué la peur au ventre leur match contre le Bénin, le désormais Petit Poucet du groupe, tout en ayant l'oreille tendue du côté d'Accra où se déroulait l'autre affiche, suspectée. Le Nigérian John Mikel Obi aurait même glissé à son coéquipier d'Arsenal, l'Ivoirien Salomon Kalou, qu'il fallait jouer le jeu et gagner le Mali dans l'espoir de donner un coup de main aux Super Eagles de passer au second tour. Et c'est ce qui s'est passé sur le terrain, notamment à la quatre-vingt cinquième minute où coup sur coup la Côte d'Ivoire marque son troisième but contre le Mali et le Nigeria son second face au Bénin. Une coïncidence. Un hasard qui scellera définitivement le sort de ce groupe et clouera le bec à la mauvaise rumeur. Les équipes de ces deux pays voisins, dont les joueurs avaient décidé de ne pas se chambrer avant et après le match, ont sauvé l'honneur en ne rééditant pas un honteux RFA-Autriche de 1982 où les deux frères germaniques avaient joué la tête de l'Algérie pour passer au second tour après un match arrangé (1- 0). Et pourtant, l'Afrique n'est pas indemne, comme le reste du monde, y compris dans les plus grands pays du football (et le scandale des matchs truqués d'il y a deux ans), de ce fléau qu'est la corruption et les matchs truqués. Au cours de cette même CAN-2008, des joueurs namibiens ont raconté, il y a seulement quelques jours, qu'ils ont été approchés par un individu leur proposant de l'argent pour perdre devant la Guinée. «30 000 dollars chacun, pour laisser la Guinée passer au second tour», aurait déclaré le président de la fédération namibienne John Muinjo. Et ce n'est pas la première tentative, durant cette CAN, nous dit-on, puisque l'entraîneur du Bénin, l'Allemand Reinhard Fabisch, aurait été sollicité par un parieur pour arranger le match de son équipe contre le Mali, ce qui a créé un malaise au sein de la CAF qui, du coup, a décidé d'ouvrir des enquêtes au sujet de ces deux cas. Signalons au passage que le Bénin avait été battu par le Mali et que la Namibie avait accroché la Guinée, ce qui enlève tout soupçon sur ces deux matchs. Tout ce bou-CAN africain intervient au moment où la FIFA a réglé ses comptes à la fédération kenyane en suspendant trois anciens officiels de toute activité liée au football pour cause de corruption et de comportement contraire à l'éthique. C'est dire que ce fléau existe bel et bien et il n'y a que des matchs comme ce Côte d'Ivoire-Mali, disputé dans la loyauté et le fair-play, qui peuvent le combattre à mort.