Constat n Refuge traditionnel des nomades contre les éléments extrêmes de la nature, la tente a accompagné depuis toujours les bédouins du Hodna, a inspiré leurs poètes et fut le symbole de leur générosité. La toile utilisée pour monter un beït chaâr (maison en poils), est tissée avec des poils de chèvre parfois mélangés à de la laine de mouton de sorte à obtenir une texture fermement entrecroisée, imperméable à l'eau et d'une longévité remarquable. Demeure amovible des nomades, la kheïma est souvent placée sur des sites qui la rendent visible de loin avec sa couleur souvent jaunâtre mariée parfois au vert, les deux tons qui forment le beau tableau que la nature sauvage de ces zones semi-désertiques offre à ses visiteurs. Mais avec le recul du nomadisme, cet habitat traditionnel a pratiquement disparu des aires du Hodna. Selon de récentes statistiques, seuls 150 à 200 ménages, concentrés essentiellement dans la région de Zerzour, près de Biskra, continuent de mener une vie nomade. Les descendants des vieux nomades se sont sédentarisés, abandonnant ainsi la séculaire transhumance. Sans renoncer pour autant au métier de leurs ancêtres, ils continuent à élever leurs troupeaux, mais dans des hangars et en leur achetant aliments du bétail et herbes sèches au lieu de parcourir des milliers de kilomètres à leur recherche. Cette mutation a été, notamment, favorisée par les programmes publics d'aide à la fixation des populations des campagnes. Ainsi de nombreuses familles se sont fixées sur leurs territoires d'origine ou sur les parcours qu'elles exploitent traditionnellement. Selon le Haut-commissariat pour le développement des steppes (HCDS), cette fixation s'est surtout opérée dans les régions de Aïn El-Melh, Sidi M'hammed et M'sif. Cette évolution a eu raison de tout le mode de vie articulé autour de la transhumance avec ses élevages camelins et ses productions de laine. En conséquence, l'évocation de la tente nomade par les poètes populaires n'a plus cours, après avoir longtemps été un thème omniprésent dans toute œuvre poétique. Les rares tentes visibles, aujourd'hui, sur les vastes steppes du Hodna sont réservées aux bergers employés par les grands propriétaires de bétail. A Boussaâda, il n'y a pas si longtemps encore, chaque ménage pouvait encore pousser la coquetterie jusqu'à posséder plusieurs tentes, une à l'usage exclusif de la famille, une autre pour les hôtes et une troisième pour les bergers. Et seuls les initiés pouvaient faire la différence entre ces tentes. C'est donc tout un pan de la vie saharienne qui s'effrite et semble, d'ores et déjà, irrémédiablement perdu. C'est aussi tout un métier, un art plutôt, qui disparaît : dresser une kheïma exige, en effet, un savoir-faire bien particulier qui tient compte de plusieurs paramètres…