Détresse Nadia désespère de trouver une solution à son problème. En vain, elle attend une aide quelconque de sa mère. Un jour seulement elle lui fait boire une tisane d?herbes censée provoquer un avortement, mais elle n?obtient aucun résultat. La pauvre fille se lance dans les travaux les plus durs sautant courant dans le petit jardin. Rien. Les semaines passent inéluctables et Nadia ne sort presque jamais de la maison, évitant son frère et son père le plus possible, portant sans ceinture les larges gandouras de sa mère. ?Écoute Nadia, lui dit un jour cette dernière. Je vais dire à ton père que ta tante Safia est malade qu?elle nous a envoyé une lettre, demandant que tu viennes à La Calle pour t?occuper de la maison et des enfants. Je pourrais le convaincre. Il faut absolument que tu quittes la maison, ton ventre commence à s?arrondir et le scandale est imminent? j?ai vu Henia, notre voisine te regarder avec insistance, quand elle est venue la dernière fois? Reste loin d?ici jusqu?à ton accouchement? Dis à Safia de s?occuper de toi. L?enfant remettez-le à l?hôpital «édoula» va l?élever... Ni vu ni connu ! ?Mais tante Safia ne veut pas de moi ! ?Dis-lui de te préserver du scandale, c?est la femme de mon frère, elle a des filles et Dieu «iastourhoum» si elle s?occupe de toi? C?est la seule solution. Tu dois absolument t?éloigner d?ici sinon tu es perdue, ma pauvre fille, tu as brisé ta vie de tes propres mains. Et Nadia, portant sa petite valise, fragile silhouette au c?ur lourd, désespérée, reprend le chemin de La Calle. ?Ne te fatigue pas trop à faire le ménage ! Et reviens en bonne santé, lui lance son pauvre père.. Si tu vois que tu es fatiguée, reprends le car et retourne dans ta maison, ajoute-t-il de son air bourru. Mécontent, son frère Hacène la regarde partir. Il s?était fermement opposé à son départ, mais sa mère a eu le dessus, traitant cette pauvre Safia «d?arbre sans racines» «Elle n?a personne pour l?aider» Pendant le long trajet qui la ramène vers La Calle, Nadia, assise près de la vitre du bus, regarde sans le voir le paysage qui défile devant ses yeux. Les virages de la route font chavirer son c?ur et elle retient difficilement l?envie de pleurer sur son sort. Assise près d?elle une jeune femme en hidjab lui sourit de temps à autre, visiblement désireuse d?entamer la conversation pour faire passer le temps. Mais Nadia tourne ostensiblement la tête, le regard perdu dans le vague. Inlassablement son aventure lui revient à l?esprit, par bribes et l?image de Salem en toile de fond ne la quitte pas, malgré tout elle essaye de s?accrocher à un espoir impossible. «Et si je me trompais ? Et s?il attendait que je revienne à La Calle pour me demander en mariage ? Après tout c?est son enfant que je porte?» Mais elle chasse aussitôt cette pensée en se disant que depuis le temps, étant donné sa situation il aurait pu donner signe de vie ? Et puis, elle sent qu?une vague de désespoir la submerge amère. «Que va-t-il m?arriver mon Dieu ?» Mais c?est surtout l?accueil de Safia qui l?inquiète le plus? «Elle me prend pour une fille de mauvaise vie? Et si elle refusait de m?ouvrir la porte ?» Et Nadia resserre sur sa poitrine les pans de sa petite veste de jersey noire, et son regard se durcit? Elle reste un bon moment debout devant la porte de l?appartement avant de sonner. Il est plus de quatorze heures et un grand silence règne dans le bâtiment. Puis prenant son courage à deux mains, elle appuie le doigt sur la sonnette. C?est son oncle, qui lui ouvre. Il reste un court moment à la fixer comme étonné, puis il lui dit : ?Entre ! ? Entre Nadia? Te voilà revenue ? ?Oui, mon oncle dit-elle glacée par cet accueil, et surtout ce regard qui en dit long. (à suivre...)