Vision n «La crise identitaire et culturelle que vit l'Algérie perturbe l'élève et lui enlève la foi dans les valeurs authentiques qu'on lui inculque à l'école.» L'école, qui sous d'autres cieux est considérée comme un sanctuaire du savoir et de l'éducation, est en train de devenir chez nous le lieu de tous les fléaux ainsi que de relations conflictuelles entre l'enseignant et l'élève. L'école, qui avait un rôle bien déterminé : le savoir et la pédagogie, a changé de vocation. Aujourd'hui, cette image «sacrée» de l'enseignant, qui était l'exemple à suivre dans tous les domaines par ses élèves, n'est plus. Les rapports entre «le maître» et le disciple sont d'abord dictés par les réalités et les changements socioéconomiques et socioculturels de la société algérienne. l'enseignant est devenu ou bien «l'ami» ou bien «l'ennemi» de l'élève. «Un choix, parfois, mais souvent une contrainte imposée par le statut bafoué et l'image ternie qu'offre l'Ecole algérienne de celui qu'on appelait avant, dans la culture arabe et algérienne, ‘'le messager'' !», regrette Ahmed, 55 ans, ex-enseignant en langue arabe dans un lycée à Alger. Ce dernier n'arrive pas à comprendre et à suivre cette mutation, faite en un temps record (une décennie), qui a fait régresser la valeur et le rôle de l'enseignant. Les élèves algériens, motivés par les médias et les nouvelles conceptions des droits de l'enfant, ont aussi leurs arguments quand ils essayent d'expliquer leur comportement d'«égal à égal» avec leurs enseignants plutôt que de rester ces disciples ayant toujours une image idéalisée de l'enseignant. Selon eux, le prof n'est là que pour enseigner sa matière. Pour l'éducation, la culture… Ils ont d'autres alternatives qu'ils trouvent meilleures et plus efficaces (les médias, la rue, la famille, l'Internet, la télévision…). Selon toujours les mêmes élèves, ce que les enseignants proposent comme éducation est en contradiction avec la société et ses repères. «La crise identitaire et culturelle que vit l'Algérie perturbe l'élève et lui enlève la foi dans les valeurs authentiques qu'on lui inculque à l'école. Il croit, alors, que tout ce que l'enseignant essaye de lui donner n'est que de l'idéalisme et, par conséquent, de l'hypocrisie tant que la société pense autrement et ne croit plus en ces valeurs», souligne Ali Arab, professeur en sociologie à l'université de Bouzaréah. Enquête sur les rapports basés sur le défi, l'ignorance et la confrontation plutôt que sur le respect mutuel, la compréhension et la communication dans une école en pleine mutation…