Amertume n Ahmed Ali Smaïl, l'ancien milieu de terrain du SCM, par une formule lapidaire, résume la situation : «On ne skie pas dans la boue». L'École des Mines, centre universitaire, a fermé ses portes. La mine du Zaccar aussi. Des centaines d'emplois ont été perdus. La direction générale de la Sonatherme y était installée puis a déménagé. L'Onex et la SN métal ont pris le relais, des postes de travail ont été créés puis des compressions de personnels sont intervenues. Le Syndicat d'initiative et du tourisme a baissé rideau. Comptant 6 000 habitants intra-muros à l'indépendance, la ville a explosé pour atteindre 40 000 habitants. La décennie noire a fait fuir les habitants de Ben Allal et Aïn Torki, villes avoisinantes. Miliana a gonflé. Ville de montagne, les terrains pour construire sont rares. Le problème du logement se pose encore. Benyoucef Djellouli, 55 ans, loge avec sa famille dans «une cage à poule». Alors, pour évacuer le stress, il court trois fois par semaine. Mahmoud Hadj-Mohamed, 57 ans, marié, retraité, deux enfants ne «pense même plus à aller chez le boucher. Je n'y arrive pas». Ahmed Mabrouk, 55 ans, bijoutier est perplexe : «Il y a deux-trois ans, le gramme d'or poinçonné était à 1 200-1300 DA. Aujourd'hui, il est passé à 2 000 DA et plus. Seul celui qui marie sa fille est obligé d'en acheter.» Après la puissance et la gloire, la chute. Ahmed Ali Smaïl, l'ancien milieu de terrain du SCM, par une formule lapidaire, résume la situation : «On ne skie pas dans la boue» tandis que se désole Boualem Maïouf : «Miliana appartient à l'Histoire, elle a existé, elle n'existe plus.» Lors du cinquantenaire de la mort d'Ali La Pointe – décédé le 8 octobre 1957 lors de la Bataille d'Alger – Ahmed Ali Smaïl relate que la cérémonie fut réduite au strict minimum : «fleurs au pied de sa statue. C'est la kasma du FLN qui a fait le geste». La célébration, qui aurait dû mobiliser toute la ville, s'est déroulée dans une intimité indigne. Mohamed Bouras, enfant des Annassers et père-fondateur des Scouts musulmans algériens, a été fusillé au Polygone du Caroubier (Hussein-Dey) en 1936, par les autorités coloniales. Lui aussi, hormis un monument auquel personne ne fait plus attention, est oublié des Milianais. Mustapha Ferroukhi, premier ambassadeur du Gpra en Chine, est décédé en 1960, au-dessus de l'Ukraine, dans un crash d'avion alors qu'il était en route pour Pékin. Bien qu'un lycée porte aujourd'hui son nom, peu de Milianais, surtout parmi les plus jeunes, savent qui il était. Plus qu'ailleurs, la mémoire flanche. Le musée de l'Émir Abdelkader, malgré un travail méritoire, souffre cruellement d'un manque de moyens. La contribution symbolique de 10 DA — le prix du billet d'entrée — demeure très modeste et ne suffit certainement pas à lui fournir les finances dont il aurait besoin pour renflouer ses finances et étoffer ses collections.