Image n «La plupart des automobilistes sont de passage, ils se dirigent vers Béjaïa et ses environs», relève l'un des deux derniers passagers du fourgon. «L'hôpital, l'hôpital», annonce le chauffeur du fourgon, un jeune homme d'une trentaine d'années environ, quelque dix minutes après avoir démarré de la station d'Azazga. Sur ce, trois passagers descendent, laissant le fourgon presque vide. La plupart de ceux qui y avaient pris place au départ du chef-lieu de daïra sont descendus en cours de route. «A cette heure-ci, rares sont les personnes qui prennent la direction de Yakourène», tente d'expliquer le jeune chauffeur entre deux coups d'accélérateur. «De plus, la journée d'aujourd'hui est fériée», ajoute-t-il, avant de se murer dans un long silence. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, la circulation automobile sur ce tronçon de la RN12 est très dense en cette journée chômée et payée du 1er mai. Il n'est que 9h 30 pourtant. «La plupart des automobilistes sont de passage, ils se dirigent vers Béjaïa et ses environs», relève l'un des deux derniers passagers du fourgon, un homme d'un certain âge que la flambée des prix semble avoir rendu fou ! «Tout est cher dans ce pays mon fils sauf la vie humaine», dit-il dans un kabyle impeccable. Le chauffeur, d'une nonchalance inégalable, ne bronche pas. Il se contente de «tourner» le volant dans tous les sens. Il faut dire que les virages sont légion dans cette région, ils se suivent et ne se ressemblent pas. Heureusement que Dame Nature, qui a mis ses plus beaux atours à l'occasion du printemps, est là, omniprésente, pour agrémenter le voyage. En effet, les lieux sont d'une beauté extraordinaire : les arbres tout verts et parfaitement alignés des deux côtés de la chaussée associés aux… «meutes» de singes qui les ont pris d'assaut, et aux premiers rayons de soleil de la journée, forment des paysages paradisiaques. Mais il n'y a que… trois familles pour les apprécier en cette matinée printanière. Les temps ont bien changé pour Yakourène ! Tout d'un coup, le fourgon s'arrête sur ordre d'un militaire. On est au barrage fixe installé à l'entrée de la commune, à une dizaine de mètres de l'hôtel Tamgout. Dans une ambiance bon enfant, des militaires et des gendarmes régulent la circulation, tout en ayant un œil sur tout. Après deux minutes d'attente, le chauffeur est autorisé à redémarrer. «Cela fait un bon moment que je n'ai pas mangé de fruits car ils sont trop chers», revient à la charge le vieil homme, sans transition aucune. «Est-ce vrai que Yakourène n'est plus fréquenté depuis un moment ?». «Les gens ne peuvent plus se permettre le luxe de faire du tourisme, la vie est trop chère mon fils», répond-il, avant de demander au chauffeur de s'arrêter pour descendre. «On est arrivé à Yakourène», conclut-il.