Projection n L'Argentine était à l'honneur, hier, à Cannes avec Che de l'Américain Steven Soderbergh, et La femme sans tête de Lucrecia Martel. Sacré à 25 ans pour Sexe, mensonges et vidéo, Palme d'Or 1989, Soderbergh est pour la troisième fois en compétition avec Che (Benicio Del Toro incarne le célèbre guérillero) qui relate la vie du jeune rebelle argentin, figure de la révolution cubaine. «Fasciné» par une vie aux «allures de roman d'aventures», Soderbergh a voulu montrer «le processus par lequel un homme doté d'une volonté sans faille, va découvrir sa capacité à inspirer et mener d'autres hommes, affirme-t-il dans un bref texte distribué à la presse. Scindé en deux pour sa sortie en salles – le premier volet est attendu en octobre, le second en novembre –, Che l'est aussi sur le plan esthétique. Car la première partie, qui évoque la révolution cubaine à travers le regard du héros est cadrée en cinémascope, tandis que la deuxième, qui raconte la «fuite en avant» du héros vers un «cul-de-sac idéologique», explique Soderbergh, est filmée dans un style «qui indique que tout peut arriver à tout moment». Après Leonera de Pablo Trapero, le Festival de Cannes accueille la deuxième fiction argentine en compétition : La femme sans tête de Lucrecia Martel, née en 1966 et venue quatre ans auparavant avec La nina santa. Produit par la société de l'Espagnol Pedro Almodovar et son frère, El Deseo, elle suit une femme de la bourgeoisie provinciale argentine. Un jour alors qu'elle file en voiture sur une route de campagne, Veronica (Maria Onetto) heurte quelque chose, mais elle n'a pas la force d'aller voir. Choquée, elle pense avoir tué quelqu'un et perd peu à peu goût à la vie. En quelques cadres élégants, suivis de plans serrés sur le visage d'une Veronica mutique, Lucrecia Martel capte le vague à l'âme éprouvé par son héroïne en guise de culpabilité, dans de subtiles ambiances de déliquescence. «Pour moi le mal ne résulte pas d'une organisation mafieuse, c'est quelque chose de gentil, d'inoffensif», a expliqué la réalisatrice. Séduit au départ, le spectateur finit par décrocher, le propos de la réalisatrice s'avérant, au final, aussi ténu que le scénario du film.