Le 5 mai 1821, Napoléon le Grand, le conquérant de l'Europe, meurt à Sainte-Hélène, officiellement d'un cancer de l'estomac, après avoir subi pendant près de cinq ans les avanies du gouverneur Hudson Lowe. Depuis, certains ont apporté des arguments troublants à la thèse de l'empoisonnement à l'arsenic. Arsenic qui lui aurait été traîtreusement administré par un de ses fidèles couvert de dettes. Mais ceci est une autre histoire... Ce n'est qu'au mois de novembre de 1840 qu'une frégate – la depuis lors célèbre Belle Poule – ramène sur le continent les cendres du plus fameux des Corses. Elle touche le quai de Cherbourg. Un prince commande le navire : le très séduisant prince de Joinville, fils du roi Louis-Philippe, descendant des Bourbons... L'arrivée des restes de l'empereur provoque une démonstration de vénération de la part du maréchal Soult, qui se prosterne devant le catafalque. Le peuple de Paris accourt... Que va devenir la dépouille du «petit caporal» ? Napoléon, qui savait bien qu'un jour il disparaîtrait a hésité dans le choix d'une sépulture. Le centre de la France lui plaît, durant un moment. Il se voit bien au confluent de la Saône et du Rhône. Mais son cœur de Corse reprend le dessus. Il choisit alors d'être enterré au milieu des siens, dans la cathédrale d'Ajaccio. Puis Paris lui semble, quelque temps après, plus raisonnable : au Père-Lachaise, comme un bon bourgeois entre Masséna et Lefebvre, chers à son cœur. En définitive, sentant sa fin proche, il indique qu'il désire être enterré «sur les bords de la Seine, au milieu de ce peuple français que j'ai tant aimé». Mais il lui aura fallu attendre dix-neuf ans avant de quitter la petite tombe de Sainte-Hélène... Maintenant il faut prendre une décision. Tous ceux qui ont voix au chapitre donnent leur avis ; bien divers, on le constate : «Napoléon, souverain légitime de la France, devrait reposer à la basilique de Saint-Denis, qui abrite depuis longtemps tous les rois. — Il veut reposer au bord de la Seine. Notre-Dame-de-Paris répond mieux à ce vœu que Saint-Denis, où il n'aurait que faire au milieu des Bourbons qu'il a combattus farouchement... — Cœur de Paris et bords de Seine, il serait plus à sa place à la Madeleine. — Mais non, pourquoi la Madeleine ? Qu'il repose au Panthéon ! — Il faut que sa tombe soit marquée par un monument qui lui rende hommage. On pourrait l'ensevelir sous la colonne Vendôme, que sa statue domine déjà.» M. de Rémusat, qui est alors ministre de l'intérieur, annonce enfin la décision prise : «Les restes de Napoléon seront déposés aux Invalides. Il importe que cette sépulture ne demeure pas exposée sur une place publique, au milieu d'une foule bruyante et distraite.» Le 15 décembre la dépouille mortelle de l'empereur, sur un char monumental traîné par seize chevaux caparaçonnés d'or, s'arrête sous l'Arc-de-Triomphe et, continuant son parcours, pénètre dans la cour des Invalides où le roi Louis-Philippe l'attend. Trente-six marins la placent sous un baldaquin de satin blanc, orné d'un aigle d'or. (à suivre...)