Résumé de la 1re partie Maria Van Beck reçoit, un matin, un papier bleu qui raviva un douloureux souvenir. Au moment de partir, Maria hésite devant le portillon du jardin. Puis elle revient en arrière et se dirige vers un massif de roses. Des roses jaunes splendides, épanouies au soleil du printemps. Elle les regarde longuement, puis se met à genoux, et cueille la plus belle. C?est ainsi qu?elle se rend à pied à la gare, tenant dans sa main la rose jaune couverte de rosée. Et c?est ainsi qu?elle arrive à Zichem, par le train. A la gare, elle se renseigne. La voilà maintenant devant une bâtisse énorme et sans grâce gardée par deux gendarmes. Très poliment, elle demande : «S?il vous plaît, monsieur, je voudrais voir le chef. ? C?est pourquoi, madame ? Maria Van Beck ouvre son sac et montre le papier bleu. ? C?est pour ça?» Le gendarme examine le papier et sourit : «Mais madame, c?est une convocation pour le mois de juillet, et ce n?est pas vous qui êtes concernée ! ? Si, monsieur, il faut que je voie le chef s?il vous plaît, c?est important. ? Ah ! bon. Si vous voulez me suivre.» A travers les bureaux de la caserne de gendarmerie, le planton guide Maria Van Beck jusqu?à une porte où se trouve inscrit : «Capitaine Zeller». Il la laisse seule un moment, en la priant de s?asseoir sur une banquette de moleskine, et revient aussitôt. «Si vous voulez entrer, madame.» Le capitaine de gendarmerie Zeller est un moustachu, au visage rond et sanguin. Il regarde entrer cette femme menue, au visage fin et au regard bleu passé, qui tient une rose jaune dans ses mains. Maria Van Beck n?est pas vraiment timide, mais le motif de sa venue est terrible. Elle ne sait plus que dire, soudain. Comment faire pour raconter, pour expliquer ? Cet homme va-t-il comprendre ? D?une main tremblante, elle tend le papier bleu et, ravalant sa salive, arrive à sortir quelques mots de sa gorge serrée : «Est-ce que vous pouvez m?écouter ?» Le capitaine à moustache devine qu?un drame est derrière ce papier bleu, cette petite femme et sa rose jaune qu?elle triture entre ses doigts, et dont les épines lui rentrent dans la chair, sans qu?elle y prenne garde. «Alors, voilà, monsieur. C?est une longue histoire. Je l?avais oubliée, je vous le jure. Il me semblait que tout cela s?était passé dans une autre vie, mais ce papier bleu a tout réveillé. ? Qui êtes-vous, madame ? Quel rapport avec nous, avec ce papier ? C?est une convocation pour un conseil de révision ! Il s?agit de votre fils ?» Maria Van Beck a un sursaut. «Mon fils ? Oui, c?était mon fils, monsieur, Jean. Je l?avais appelé jean comme son grand-père. C?était mon fils. ? Que lui est-il arrivé ? Il lui est arrivé quelque chose, c?est ça ?» Maria Van beck hoche la tête, essuie une larme qui dégouline sur sa joue, sans un sanglot, comme ça, et puis se met à parler. La rose jaune, sur ses genoux, commence à flétrir. «C?était il y a presque vingt ans, monsieur. Mon mari venait de s?engager dans la Légion. Il m?avait laissée seule avec mon fils aîné Pierre, qui avait trois ans, et Jean le petit dernier. Jean avait dix-huit mois.» «Un soir, j?étais au rez-de-chaussée, j?attendais le passage du train de vingt-deux heures trente. Je suis garde-barrière, vous comprenez. Les enfants étaient couchés depuis longtemps. Je leur avais fait une soupe au riz et du flan au caramel. Ils dormaient chacun dans son petit lit au premier étage. Tout était silencieux. Après le passage du train, je suis montée les voir. Ils étaient tranquilles.» (à suivre...)