Préjugé n Ayant acquis la notoriété d'être «un segment de population à influence réduite» lors des rendez-vous électoraux, la communauté noire pourrait bien faire cette fois exception à la «règle». Les Noirs américains, encouragés par la candidature du métis Barack Obama pour la Maison-Blanche, devraient se mobiliser comme jamais lors du scrutin du 4 novembre et leurs suffrages pourraient s'avérer décisifs dans certains Etats tangents. Depuis des mois, des militants poussent la communauté afro-américaine, déjà largement favorable aux démocrates (à 90% à toutes les présidentielles depuis 1980), à s'inscrire massivement sur les listes électorales alors que ce segment de population a une influence traditionnellement réduite sur l'issue du scrutin présidentiel. La présence d'importantes populations noires dans des Etats pouvant basculer dans un camp ou l'autre comme la Virginie, la Floride, l'Ohio, la Caroline du Nord et le Missouri, pourrait transformer le paysage électoral américain en donnant à cette minorité un poids inédit le 4 novembre. Les responsables communautaires font feu de tout bois, allant à la pêche aux nouveaux électeurs dans les églises, les groupes d'étude de la Bible, des réunions de famille, des concerts de hip-hop et même les tribunaux. «Nous essayons de récupérer des gens qui n'ont jamais été inscrits et n'ont jamais voté», explique le révérend Ronald Winters, chef de l'Association pour le progrès des personnes de couleurs à Fairfax (Virginie). La campagne d'inscriptions menée par des équipes chargées de distribuer les formulaires nécessaires s'est terminée début octobre, avec la clôture des registres. Les Afro-américains ne représentent que 12% de l'électorat, mais 40% de la population emprisonnée. La campagne de mobilisation a donc visé aussi les anciens détenus qui, en fonction de la loi de l'Etat où ils se trouvent et de la sévérité de leur condamnation, peuvent avoir conservé ou peuvent récupérer leur droit de vote. Un autre élément a été de convaincre les jeunes Noirs de voter, à travers des concerts de vedettes du rap comme Bow Wow. L'âge médian des Afro-Américains est de 31 ans, 10 ans de moins que celui des électeurs blancs, et les jeunes ont largement boudé les urnes lors des précédents scrutins. «Obama a une énorme influence et fait un gros travail pour mobiliser les jeunes électeurs », souligne David Bositis, du Joint Center for Political and Economic Studies. «Je prévois une hausse d'environ 20 points de la participation de l'électorat noir par rapport à la dernière fois», indique M. Bositis, en rappelant que seulement 56% des Afro-Américains en âge de voter l'ont fait à la présidentielle de 2004. Ce phénomène pourrait renverser les résultats d'Etats clés comme la Floride et la Virginie où la participation des Noirs avait été «beaucoup plus faible que celle des Blancs», selon le Joint Center. La campagne d'inscription semble avoir porté ses fruits avec un afflux de 306 000 nouveaux électeurs sur les listes de Virginie au 30 septembre, dont 42% des 18-25 ans.