Résumé de la 3e partie n Malgré tous les moyens utilisés, la jeune fille ne révèle pas l'identité du père de l'enfant, mais quand il naît, Si Mohamed voit qu'il est noir... Une fille de race libre accorder ses faveurs à un vil esclave ! Cela dépassait tellement les bornes, paraissait si contre nature, que jamais le marabout n'avait pu soupçonner Kara. Et c'était lui qui avait cueilli cette fleur, pour laquelle avaient soupiré les plus nobles et les plus beaux, qui tous avaient été éconduits ! Quelle honte ! la fille des marabouts les plus renommés de la contrée se livrer à un esclave, à quelque chose de semblable à un animal ! Si Mohamed n'avait jamais eu aucun soupçon, n'avait pu en avoir ! Voilà que la vérité apparaissait claire, indiscutable, palpable. L'enfant de sa fille était noir ! Lorsqu'il se releva, après un court évanouissement, il appela sa femme : l'enfant piaillait, la face contre terre ; le marabout n'y prit point garde, il questionna la vieille. — Où est Kara ? — Aux champs avec Si Amar, répondit-elle. — Bien, va prévenir de suite nos proches parents, qu'ils viennent, en apportant leurs armes : je connais maintenant le séducteur de ma fille La vieille regardait l'enfant et la stupeur paralysait ses jambes ; elle aussi connaissait la couleur hideuse ! Elle sortit enfin, se hâtant, car elle comprenait que son mari devait avoir soif de vengeance. Les parents arrivèrent bientôt et Si Mohamed s'armant à son tour, les pria de lui prêter main forte, pour arrêter son esclave. La couleur qui gisait là, le dispensait d'explications. Les hommes partirent, et la vieille mère, accablée sous un pareil coup, ramassant le fils de leur serviteur, le remit sans mot dire à sa fille. Machinalement, pour le faire taire, poussée par l'instinct maternel, Zohra lui donna le sein. Arrivés dans la campagne, les hommes ne tardèrent pas à apercevoir Si Amar, assis dans un champ de figuiers que Kara élaguait. Ils se divisèrent pour entourer le noir, mais celui-ci, n'ayant pas la conscience tranquille, se tenait sur ses gardes il s'élança pour fuir. Si Mohamed cria à son fils : — Arrête Kara ! arrête le misérable ! c'est lui l'amant de ta sœur ! Si Amar, sans hésiter, obéit à la voix paternelle il saisit Kara à bras le corps, cherchant à le maintenir jusqu'à l'arrivée de ses parents. Malgré sa vigueur, le jeune marabout ne pouvait tenir tête à cet hercule de bronze. A demi-étranglé, il roula sur le sol avant que son père et les siens eussent pu venir à son secours. Kara, bondissant par-dessus le mur d'enceinte, s'enfuit à travers les arbres. Des coups de feu furent tirés sur lui, mais en vain ; Kara disparut et jamais on n'eut depuis de ses nouvelles. Le marabout, après avoir relevé et soigné son fils, revint tristement au village, pendant que ses parents continuaient leur poursuite infructueuse. Il laissa la journée s'écouler, dans une sorte de calme stupide, tressautant seulement quand les vagissements de l'enfant parvenaient jusqu'à lui. Vers le soir, il appela son fils et, silencieusement, vint s'asseoir à la Djemâa. (à suivre...)