Résumé de la 7e partie n Un vieillard propose à Kassi de venger son fils en tuant un général allemand, mais personne ne veut exécuter cet acte. Ses yeux creux brillèrent comme ceux d'un fauve ; le tirailleur relativement instruit s'effaça, il ne resta plus que le vieux Berbère, décidé à appliquer les Kanouns de sa patrie, dans toute leur rigueur : Tête pour tête, sang pour sang. Devant la lâcheté des siens, il eut honte, se leva et dit froidement : — Puisque chacun décline la responsabilité de l'application de la peine, c'est moi, le plus proche parent, qui m'en chargerai. Vous pouvez ramasser vos figues et rester près de vos femmes ; Kassi Guiril a sa maison vide, il peut et il veut aller en France tuer le général prussien et venger Ali. Les parents essayèrent de le faire revenir sur sa décision, mais le vieux était entêté et malgré toutes les représentations, il résolut de se rendre en France pour tuer le «jenninar» qui devait payer pour la mort de son fils. En vain on lui objecta qu'il était infirme, qu'à peine il pouvait tirer un coup de fusil avec un bras en moins, qu'il était vieux, que c'était folie d'essayer quelque chose contre ces terribles Allemands, plus forts que les Français mêmes. Le vieux tirailleur ne répondait même plus et partit un jour pour Fort-Napoléon. Arrivé devant le commandant supérieur, il lui expliqua sa résolution après le vote de sa karouba : il était seul à venger son fils, dont l'existence, de l'aveu de tous, valait bien celle d'un général. Il était donc décidé à tuer le premier général prussien qu'il rencontrerait. Emu de tant d'absurde héroïsme, l'officier lui serra la main et essaya, lui aussi, de le dissuader. On ne faisait pas la guerre en France comme en Afrique, par de petites surprises d'embuscades, de combats corps à corps ; il devait bien le savoir lui, le vieux soldat qui avait fait la grande guerre : il ne courait guère que la chance de se faire fusiller, soit par les Prussiens, comme irrégulier, soit par les Français comme espion. En ces temps difficiles, il valait mieux pour lui et pour la France qu'il restât dans sa tribu. Que ferait-il, du reste, isolé et invalide ? Qu'il laissât faire la France, elle allait se relever et venger d'elle-même ses désastres et le meurtre d'Ali. Le vieux sergent répondit en priant son chef de le faire admettre aux tirailleurs comme engagé volontaire. Il n'avait qu'un bras, mais il était bon et il tirait encore très bien un coup de fusil ; il emporterait son flissa et il savait se glisser dans la brousse pour surprendre et égorger les sentinelles. Quelque chose lui disait qu'il arriverait à tuer «son général». Le commandant, voyant qu'il ne pouvait vaincre cet héroïque entêtement, lui opposa les règlements qui interdisent l'engagement d'hommes non valides et le renvoya chez lui ; il n'avait qu'à attendre quelques jours, pour être nommé à la tête d'une tribu, car la France saurait se montrer reconnaissante de tant de services rendus et du sang versé pour elle. «Le burnous rouge ne me rendra pas mon fils et ne me payera pas la dette de la Prusse», répondit le Kabyle, et il revint à sa maison, ferme dans sa résolution, élaborant un plan de vengeance. (à suivre...)