Avis n Les Etats doivent développer un régime interne complet de réglementation et de contrôle des banques et institutions. La faille consiste dans les systèmes financiers des Etats dont des quantités considérables de transactions financières contractées se font en dehors du contrôle des banques et des institutions. Ceci facilite la tâche aux groupes occultes qui commettent des infractions économiques en produisant des actes illicites, favorisant ainsi un climat économique malsain où règnent le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Ce constat a été fait par les deux experts français, Vuelta Simon et Abdelwaheb Bendimered, respectivement directeur adjoint à l'Ecole supérieure de la magistrature de Bordeaux et chef de mission au sein de la même école, hier, lors d'un séminaire de formation juridique des magistrats à l'Ecole nationale des magistrats à Alger. Pour eux, ce déficit en réglementation et en contrôle laisse les portes ouvertes aux blanchisseurs, pour développer leurs actions de blanchiment de capitaux allant jusqu'à corrompre les entreprises stratégiques et les institutions publiques. «La criminalité organisée profite de cette situation pour aller très loin, même jusqu'à prendre le pouvoir politique dans les Etats où le système financier est mal contrôlé», dira M. Bendimered. Selon le conférencier, cette situation de désordre pourrait contaminer les économies des autres pays à travers la pénétration des frontières, en opérant dans le cadre de «la criminalité transnationale organisée». Dans ce sillage, il rappellera les deux conventions internationales des Nations unies, l'une du 9 décembre 1999 pour la suppression du financement du terrorisme (CFT) et l'autre conclue à Palerme le 14 décembre 2000, contre la criminalité transnationale organisée (CP). «La CP oblige les Etats à considérer comme une infraction pénale le blanchiment d'argent afin de faciliter l'entraide judiciaire entre les Etats», explique le conférencier aux élèves juges algériens. Elle recommande, poursuit-il, également aux Etats de développer un régime interne complet de réglementation et de contrôle des banques et institutions destiné à prévenir et détecter l'utilisation abusive des systèmes financiers, mais aussi à faciliter la poursuite des infractions et à réprimer le blanchiment. L'expert international – il a exercé dans des institutions internationales comme les Nations unies –, a rappelé la résolution n°1373 du Conseil de sécurité et les recommandations du Groupe d'action financière international (Gafi), qui érigent en règle l'obligation pour les pays de s'apporter mutuellement l'assistance la plus large dans le cadre des enquêtes, poursuites et procédures connexes ayant trait au blanchiment et au financement du terrorisme, qu'il s'agisse de l'entraide judiciaire ou de l'extradition. Il a indiqué que «les Etats parties, en refusant d'adopter cette disposition dans leur droit interne, violent donc délibérément les obligations conventionnelles qu'ils ont pourtant librement contractées». Sollicités, par ailleurs, pour donner leur avis sur le système financier algérien par rapport au phénomène du blanchiment d'argent, les conférenciers se contentent de dire que même si beaucoup de transactions financières échappent au contrôle des institutions faute de disponibilité de cartes électroniques bancaires, l'Algérie reste à l'abri des blanchisseurs de fonds grâce au caractère non spéculatif de son système financier. Néanmoins, estiment les experts, la législation doit être adaptée aux particularismes culturels et institutionnels pour bien appréhender le phénomène en question. Pour sa part, Hocine Mebrouk, le directeur de l'Ecole nationale des magistrats, a souligné, lors d'une brève entrevue avec les experts, que le phénomène du blanchiment d'argent pourrait venir des pays producteurs de drogue, à l'instar du Maroc dont la maffia fait venir des quantités importantes dans notre pays, favorisant ainsi ce genre d'infractions, telles que le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.