Résumé de la 2 e partie n Madeleine Béraud réussit à faire «parler» son interlocuteur qui lui fait comprendre qu'elle est une femme muette... Bien entendu, entre-temps, Madeleine s'est renseignée sur la méningite et elle sait que cette grave affection du cerveau peut entraîner un mutisme définitif, ainsi que toutes sortes de troubles mentaux et nerveux. Elle n'en est que d'autant plus attentive et affectueuse avec sa jeune malade. Sans négliger les autres correspondants qu'elle a quotidiennement, elle pense d'abord à elle. C'est dire l'émotion qu'elle ressent en février 1971 une semaine se passe sans l'appel traditionnel, puis une autre, puis le mois entier... Madeleine Béraud essaie de se rassurer. La jeune muette est peut-être en vacances de neige, vu la saison. Car, même si elle se refuse à s'exprimer sur ce sujet, elle ne doit pas être seule. Elle doit avoir des parents, des gens qui s'occupent d'elle. Mais au fond d'elle-même, Madeleine est morte d'inquiétude. Est-ce que l'irréparable se serait produit, est-ce que la jeune fille n'aurait pas supporté son infirmité, est-ce qu'elle aurait commis un geste désespéré ? Comment le savoir ? Elle ne sait ni son nom ni son adresse. Rongée de remords, Madeleine essaie de se souvenir de ce qu'elle lui a dit la dernière fois. Aurait-elle dit quelque chose qui lui aurait déplu ? Elle a beau chercher, elle ne voit pas. Elle continue sa permanence à SOS Amitié. Chaque fois qu'un correspondant tarde à prendre la parole, elle espère... Mais non, ils parlent au bout d'un moment et, même s'ils restent silencieux, ce n'est pas la respiration qu'elle connaît bien. Un mois a passé. Nous sommes au début mars. Il est 11 heures du soir. Le téléphone sonne à SOS Amitié. C'est l'heure de la petite muette. Madeleine Béraud a, comme chaque fois, un vague espoir, bien qu'il s'amenuise au fil du temps. — SOS Amitié. Je vous écoute... L'attente de Madeleine est aussitôt déçue. C'est une jeune femme qui prend la parole : — Je m'appelle Michèle. — Je vous écoute, Michèle. Quel est votre problème ? Vous pouvez parler sans crainte. Je suis une amie. — Je sais que vous êtes mon amie, Madeleine. — Vous connaissez mon nom ? Au bout du fil, il y a un rire léger. — Pas seulement le vôtre. Je connais celui de vos enfants, leurs résultats à l'école, tous les films que vous avez vus. — C'est vous ? Mais comment... ? — Je reviens de l'hôpital où on m'a opérée du cerveau. C'est pour cela que je ne vous ai pas appelée pendant un mois. L'opération était délicate, elle avait même très peu de chances de réussir, mais elle a été un succès complet. Il y a un silence. Le premier silence volontaire de la part de la jeune Michèle. — Maintenant, il faut que je vous fasse une confidence. Lorsque je vous ai appelée la première fois, je ne savais pas encore que l'opération serait possible. Je pensais vraiment que je serais muette pour la vie et j'allais faire une bêtise. Machinalement, j'ai décroché le téléphone pour demander du secours. Je me suis rendu compte aussitôt de l'absurdité de mon geste. Et puis je me suis souvenue de SOS Amitié dont j'avais lu le numéro quelque part. Je suis tombée sur vous et j'ai eu de la chance... Elles ont conversé encore un moment et puis Madeleine, pour la première et la dernière fois de sa vie, a dérogé au règlement : elle lui a donné son numéro personnel. Pour ne pas encombrer plus longtemps le standard, elle a demandé à Michèle de la rappeler chez elle. Et là, elles ont parlé enfin toutes les deux aussi longtemps qu'elles voulaient. Madeleine a dû répondre à toutes les questions que lui posait la jeune fille. C'est inimaginable ce qu'elle pouvait être bavarde ! Il est vrai qu'elle avait du retard à rattraper.