Attente Depuis de longues heures déjà, Saïd guette la petite porte de la maison de pierre. Embusqué derrière un arbre du jardin, le doigt sur la gâchette de son fusil, il attend. A mesure que le temps passe, le jeune homme s?énerve et sa colère augmente. «Quoi ? Ne va-t-il pas sortir, ce chien ?» De temps en temps, il jette un coup d??il autour de lui, de peur d?être découvert par un voisin se rendant à la mosquée pour la prière du fedjr? L?attente semble interminable, et le jour qui commence à poindre, éclaire maintenant la cime des arbres au-dessus de sa tête. Immobile, les yeux fixés sur la maison, Saïd attend? Puis, le bruit de la traverse de la porte lui parvient, comme un signal. Le panneau s?ouvre et une haute silhouette, légèrement courbée, se dessine dans la lumière blafarde. Saïd ajuste et tire. La détonation explose dans le petit matin comme un coup de tonnerre, et l?homme tombe sans un cri. Saïd relève son arme et s?enfuit à travers les arbres? Quand, après le déjeuner, il se décide à regagner le village, il rencontre Brahim, le fils de son voisin, revenant visiblement du souk, un lourd cabas sur l?épaule. Ce dernier dépose sa charge, haletant, et dit : «Tu es là, Saïd ? Personne ne t?a rien dit ?» Il reste un moment à le fixer, les yeux plissés dans le soleil? «Quoi Brahim ? Que s?est-il passé ?» Brahim, sans le quitter des yeux lui dit, de sa voix traînante : «Ouah ! Ton père Rabah !? ? Qu?a donc mon père ? Saïd est imperturbable. ? Ton père a été tué d?un coup de feu ce matin. ? Quoi ? ? Oui, on lui a tiré dessus, dit Brahim lentement, alors qu?il ouvrait sa porte? Quelqu?un l?attendait et lui a tiré dessus !» Sans dire un mot, laissant Brahim planté là, Saïd dégringole la pente à grands pas et se dirige vers la maison de son père? De loin, il entend les pleurs des femmes et les lamentations de Zghouda, sa belle-mère. Dans la cour, devant la petite maison, il y a un attroupement. Des hommes, qui ont accouru dès l?annonce de la nouvelle, forment des petits groupes autour du lieu du crime. Ses oncles sont là aussi avec leurs fils, le fusil sur l?épaule. Partout c?est la consternation? (à suivre...)