Exposition n L'expression se veut contemporaine, l'approche individuelle et l'imaginaire photographique expressif, suggestif. Le Musée d'art moderne d'Alger (MAMA) abrite, depuis mercredi, et ce, jusqu'au 30 mai, une exposition des arts visuels. L'exposition a pour titre «Regards reconstruits» et réunit, dans un même espace, le temps d'une représentation ou d'une performance visuelle, onze photographes et vidéastes, chacun a choisi de porter un regard sur une réalité physique ou une expérience mentale qui lui est personnelle. Chacun a développé une thématique à laquelle il est étroitement lié. L'univers que renvoie chacune des photographies se trouve aux frontières du réel, à l'orée de l'irréel et du fantasmagorique. L'expression se veut contemporaine, l'approche individuelle et l'imaginaire photographique expressif, suggestif. Khaled Lagoune développe une fantasmagorie nocturne : il photographie des scènes et des instants. Le port d'Alger apparaît, la nuit, solitaire, mystérieux. Il s'accentue de silence, d'énigmes et de profondeurs, surtout lorsque les bateaux et les conteneurs revêtent des allures fantomatiques. Tarek Iles photographie la mer, silencieuse, glaciale et brumeuse. La mer s'enveloppe d'un voile de mystère. Un sentiment d'une présence invisible se fait sentir. La brume intensifie, fait croître et renforce cette impression. Au loin, des lueurs de lumières apparaissent, çà et là, éparpillées, comme s'il s'agissait d'yeux rutilants ; elles accentuent cette atmosphère pesante et suspecte. Les photographies de Abderrahman Ouatou s'illustrent d'instants éphémères, fugaces, mais que seul l'objectif de l'appareil a pu – et su – figer, rendre immuables, constants. Ses photographies vivent, respirent une joie et une tranquillité innocente. Elles sont un pur moment de quiétude, de gaieté et de béatitude infantile. D'autres photographies, un air érotique se dégage dans une ambiance feutrée, drapée, voilée... Fayçal Guettaf photographie Alger. Il transpose sur le cliché des décors urbains, quant à Fayçal, il fait dans l'anthropomorphisme, c'est-à-dire qu'il zoome sur l'élément minéral. Il photographie des pierres, des roches et le sable des dunes. Le désert devient son champ d'action. Naïma Saâd Bouzid déambule sur les quais de la gare et photographie wagons, rails et trains, le tout est représenté à l'endroit comme à l'envers. «Ce que je veux montrer, ce ne sont pas les seules vertus du métal, mais ce qu'il cache en lui», explique-t-elle. Mohamed Guesmia restitue dans le cliché l'euphorie et la transcendance des chants de l'Ahellil. Les représentations de chanteurs et musiciens ou de danseurs se révèlent fuyantes, indistinctes, vaporeuses, amples et flottantes, comme s'il s'agissait d'allusives et d'évasives réminiscences. Autant d'artistes que de photographies, de regards que de sujets, d'imaginaire que d'esthétique composent l'exposition. l «Après la peinture, on a décidé de donner la parole à onze jeunes photographes algériens», dira Mohamed Djehiche, directeur du musée d'art moderne. Il explique : «La photographie étant un des arts et moyens d'expression les plus pauvres et marginalisés dans notre pays, nous avons donc envisagé cette exposition. Il s'agit pour nous de le réhabiliter comme un art à part entière. Ce sera l'occasion de faire connaître la photographie, qui reste un moyen d'expression encore peu connu du grand public.» Ainsi, pour mieux faire connaître la photographie, qui est un art au même titre que tous les autres et pour encourager les jeunes artistes, «nous avons décidé d'établir une tradition en accueillant, à partir de cette année et à chaque mois de mars, une exposition de photographies». Le commissaire de l'exposition, Omar Meziani, dira, pour sa part : «Cette exposition introduit les regards d'artistes plasticiens et de photographes qui utilisent l'outil de l'objectif pour construire à partir d'éléments visuels quotidiens une esthétique intimiste impliquant des images statiques arrachées à l'écoulement du temps et d'autres animées, répétitives, contraintes à un mouvement cyclique à la linéarité du temps.»