Instants figés dans le temps en photos et vidéos décrivent dans cette expo des moments sublimés grâce au talent et à l'âme poétique de nos artistes, designers, photographes et autres architectes. Quelques artistes devant exposer leurs oeuvres, mercredi prochain, au Musée d'art moderne et contemporain d'Alger, ont animé hier matin un point de presse afin d'évoquer leur art. Il s'agit plus précisément de la photographie prise au vif en argentique et en numérique. «Après la peinture, on a décidé de donner la parole à onze photographes algériens, la photographie étant un des arts et moyens d'expression des plus pauvres et marginalisés dans notre pays car des plus employés par "monsieur Tout-le-monde."» «Il s'agit pour nous de le réhabiliter comme un art à part entière», a souligné le directeur du musée, M.Djehich. Et de faire remarquer: «Regards reconstruits est l'intitulé de cette expo dont les artistes ont choisi de porter un regard autour de thèmes différents dont certains se trouvent aux frontières humaines, abstraites et physiques. A côté, il y a la vidéo. Enfin, nous avons choisi de monter une exposition de photos chaque mois de mars. Aussi, nous avons choisi sciemment d'exposer des oeuvres d'artistes qui ne font pas partie des ténors de la photographie mais plutôt des jeunes talents, dans ce qui s'inscrit au titre de cette démarche liée à la créativité, l'originalité et l'émotion qui s'en dégagent». Et le commissaire de l'exposition Omar Meziani de dire: «L'exposition Regards reconstruits introduit les regards d'artistes plasticiens et de photographes qui utilisent l'outil de l'objectif pour construire à partir d'éléments visuels quotidiens une esthétique intimiste impliquant des images statiques arrachées à l'écoulement du temps et d'autres animées - répétitivités - contraintes à un mouvement cyclique à la linéarité du temps.» Aussi, évoquant le travail de Fayçal, ce dernier restitue à nos yeux la rudesse du désert imprégné d'un regard mystique anthropomorphique de ses objets figés auxquels il impute une âme. Pour sa part, Ouatou, qui travaille sur l'instant, dira que «cette âme, devient âme, devient soeur qui s'estompe amoureusement, voluptueusement dans des aquarelles sensibles à fleur de souvenirs». Cette âme devenue poisson danse dans les tableaux de Rachida Azdou, fugace, poétique et fragile. Mohamed Gasmia nous restitue de son côté l'euphorie et la transcendance des chants de Ahelil, tandis que Abchiche Samir porte un regard assez tendre sur la continuité historique des ksour. Zakaria Djehiche plaque des visages contre des vitres qui se retrouvent déformés, mettant en exergue «cette barrière translucide mais réelle entre les individus, les peuples et les continents». Lyès Tarik aborde quant à lui l'âme de la nature avec une force suggestive. La lumière devient un esprit cotonneux qui se laisse mirer avec plaisir. S'agissant de Hakim Guettaf et Salim Aït Ali, qui travaillent sur la ville d'Alger depuis trois ans en vue d'élaborer un beau livre, «posent un regard tendre sur les lignes fuyantes; leurs techniques du noir et blanc rajoutent une certaine ambiance de pathétisme amoureux comme si la belle, l'odalisque aux formes harmonieuses, se perd dans des pensées suicidaires. Tag sur tag, ils s'expriment en un commun accord...une caresse sur cette ville qui était longtemps ignorée, incontestablement aimée, souvent malheureusement qu'avec nostalgie», explique Omar Meziani. Des tableaux, en effet, en noir et blanc qui expriment finalement leur vision éclairée de notre époque sur cette ville tant chérie pourtant mais malmenée. Il s'agit également pour Hakim Guettaf de communiquer de nouveau avec son pays, ses gens avec lesquels il avait coupé pendant un moment. «La photo est paradoxalement un moyen d'expression et de rapprochement qui me conduit vers l'autre». Pour sa part, Naïma Saâd Bouzid a choisi de porter un regard féminin sur le métal. «Il suffit juste de dépoussiérer ses yeux pour le voir sous son vrai jour et en être émerveillé», dit-elle. Aussi, Khaled Laggoune a choisi d'orienter son regard vers ce qui l'entoure, ce port d'Alger où il dit habiter juste à côté, pour scruter «ces conteneurs et pousser notre curiosité à en deviner les origines et les destinations de leur contenu». En somme, l'expo «Regards reconstruits» part de l'infiniment petit - parfois banal - pour rendre compte de l'infiniment sublime et étrangement esthétique et orignal, ce qui est le propos de toute oeuvre d'art, a fortiori dan son acception moderne et contemporaine. Décliné en différents formats et genres réalistes ou abstraits, chaque tableau renvoie à une sensibilité bien distincte. En parler serait vain. Il convient plutôt de toucher non pas du doigt mais de la vue ses oeuvres, autrement de venir les apprécier de plus près, tant l'originalité est «palpable» Le vernissage de «Regards reconstruits» aura lieu ce mercredi à partir de 18h. L'exposition s'étalera jusqu'au 30 mai. A découvrir!