Il était une fois un roi qui n'avait qu'un fils. Le jeune prince était grand amateur de chasse et de longues chevauchées dans la forêt. Chaque fois qu'il sortait, les habitants devaient se garer, car son cheval fougueux traversait en trombe les rues de la ville, sans souci des passants ou des obstacles. Un jour que justement, il poussait sa monture à fond de train, impatient d'être déjà dans la forêt, il heurta une vieille femme qui ne s'était pas assez vite retirée de la route et il faillit l'écraser. — Ôte-toi de mon chemin, vieille sorcière, dit-il en cravachant son cheval. La femme se releva et de loin lui cria : — Tu as failli m'écraser parce que tu es le fils du roi. Que serait-ce si tu avais épousé la fiancée du soleil ? Le prince aussitôt fit rebrousser chemin à son cheval, rentra au palais et, prétextant qu'il était malade, s'alita. On appela à son chevet les médecins les plus réputés du royaume. Ils l'auscultèrent longuement et ne purent trouver ni la cause ni le remède de sa maladie. Comme le prince continuait de languir, ils lui proposèrent d'appeler des praticiens des pays étrangers. — Inutile ! dit le prince. Ils ne sont pas plus habiles que vous. — Nous avons épuisé toutes les ressources de la science. — C'est que la science n'y peut rien... Non ! Un seul être au monde peut me guérir. — Qui ? s'écria la mère. — La sorcière de la ville. Le roi fit mander la vieille femme immédiatement. Dès qu'elle fut devant lui, le prince lui avoua qu'il n'avait rien, mais la somma de lui dire en quel endroit du monde habitait Fiancée du Soleil, car il ne trouverait le repos que quand il serait parvenu jusqu'à elle. — Fiancée du Soleil, dit la sorcière, est maintenant la femme du roi des Noirs. — Qu'importe, dit le prince, j'y vais. — Son mari la garde jalousement. — Où ? — Au pays de Hautmont. — Et où se trouve Hautmont ? — Par là, dit la sorcière, et elle tendit le bras vers un point de l'horizon. — A quelle distance ? — Avec ton cheval et tes chameaux, il te faudra un mois. Le prince aussitôt se déclara guéri. II demanda au roi son père l'autorisation de partir pour un long voyage, chargea sur plusieurs chameaux des sacs pleins de pièces d'or et d'argent et, monté sur son cheval, prit la direction que la vieille femme lui avait indiquée. Au bout de quelques jours il quitta le royaume de son père et entra dans un pays qu'il ne connaissait pas. Il n'y avait pas beaucoup marché, quand, de l'autre côté du chemin, il vit venir un homme enchaîné que des cavaliers poussaient devant eux : — Où menez-vous cet homme ? demanda-t-il. — Au supplice, dit le chef des gardes. — Pour quel crime ? — Il a déjà tué et dévalisé plusieurs fois et, parce que chaque fois il promettait de ne plus recommencer, la justice du roi lui a, jusqu'ici, toujours pardonné. Mais il vient de récidiver et le juge, cette fois, l'a condamné à mort. Le fils du roi pensa qu'un homme aussi décidé pourrait lui être d'un grand secours dans la quête périlleuse qu'il avait entreprise et qui, probablement, ne faisait que commencer. (à suivre...)