Les derniers événements entre Alger et Rabat ont pris la part du lion dans la conférence de presse mensuelle, animée hier conjointement par le ministre de la Communication, Abdelkader Messahel, et le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra. Les deux représentants du gouvernement ont vainement insisté sur le fait que l'Algérie ne tient pas à répondre aux provocations du royaume chérifien. Malgré cela, de nombreuses questions ont porté sur le sujet comme à titre d'exemple sur la position de l'Algérie après les dernières attaques qui l'ont visée dans le dernier discours du roi Mohamed VI, l'absence d'excuses officielles du Maroc après la violation du consulat de l'Algérie à Casablanca et l'atteinte au drapeau national ou encore l'évolution des relations entre les deux pays après ces incidents. Prenant la parole, le ministre de la Communication, Abdelkader Messahel a commencé par rappeler que la position algérienne est «sage, sereine et modérée» et qu'elle a été saluée par la communauté internationale. Il a ensuite rappelé encore que sur la question du Sahara occidental «l'Algérie a une position de principe conforme à celle de l'ONU, qui est connue et qui n'a jamais changé. Nous avons, comme à notre habitude, exprimé librement et souverainement notre position». M. Lamamra précisera pour sa part que l'Algérie ne souhaite pas répondre constamment à chaque provocation «en diplomatie, le silence peut être extrêmement éloquent. Nous ne souhaitons pas faire quotidiennement des commentaires». Il expliquera cependant que l'attaque du consulat d'Algérie à Casablanca est «une violation du droit international. Il y a eu un premier forfait avec la violation du consulat, un second avec l'atteinte au drapeau national, aggravé par le fait que cela a été commis un premier novembre». Ne mâchant pas ses mots, le ministre des Affaires étrangères ajoutera «les autorités marocaines savent très bien ce qu'il y a lieu de faire pour sortir de cette impasse. Parce qu'effectivement, elles se sont mises dans une impasse». M. Lamamra ajoutera «l'Algérie a demandé à être associée à l'enquête car nous avons toutes les raisons de rejeter la thèse de l'acte isolé. Ce n'en est pas un. Nous avons la preuve visuelle que l'acte n'est pas isolé. Notre demande d'être associés à l'enquête n'est pas exorbitante. C'est une demande appropriée et conforme aux traditions internationales.» «Celui qui n'a rien à craindre devrait être heureux de pouvoir apporter la démonstration de sa bonne volonté. Une fois que cette question sera discutée, nous serons en mesure de parler d'autres développements éventuels». Tout en insistant sur le fait que l'Algérie différencie parfaitement entre le dossier du Sahara occidental et sa relation bilatérale avec le Maroc, le ministre des Affaires étrangères lâchera «il y a faillite morale chez ceux qui transgressent le droit international». A la question de savoir si l'Algérie participera à la réunion portant sur la sécurité des frontières entre le Maghreb et le Sahel, qui se tiendra à Rabat, M. Lamamra dira «l'Algérie a participé à la conférence de Tripoli en 2012. Nous n'avons pas discuté d'un autre type de réunion. Néanmoins, l'Algérie ne pratique pas la politique de la chaise vide». Et d'ajouter après l'insistance des journalistes «l'Algérie a été invitée mais je n'ai pas dit que j'avais un projet de voyage dans les prochains jours». Sur un autre sujet, celui du report de la visite du ministre des Affaires étrangères des Etats-Unis, John Kerry, le chargé de la diplomatie algérienne a tenu encore une fois à préciser que la décision du report a été prise «d'un commun accord car la réunion aurait pu être maintenue à un niveau inférieur. M. Kerry sera à Alger dans les semaines à venir». A ce propos, le ministre a tenu à rappeler que les échanges économiques entre l'Algérie et les Etats-Unis sont plus importants que les échanges de ce pays avec l'ensemble des pays maghrébins. Il a également précisé que les relations sur le plan politique ne se limitent plus à la coopération contre le terrorisme mais se sont élargies à des consultations stratégiques. Une question sur le conditionnement des observateurs européens de leur prochaine venue par l'assainissement du fichier électoral a été adressée aux animateurs de la conférence de presse. M. Lamamra a commencé sa réponse en expliquant qu'à la fin de la dernière consultation électorale, les observateurs européens ont remis un rapport contenant plus d'une trentaine de recommandations «17 recommandations ont été acceptées par les autorités algériennes en toute souveraineté. Pour le reste, l'Algérie prend en considération les propositions et elle est entrain de les étudier. Nous le faisons, en premier lieu, pour nous-mêmes. Je tiens juste à préciser qu'il n'y a eu aucune condition formulée par les observateurs européens». L'ouverture médiatique, les diplomates otages, les prisonniers algériens en Irak, la demande d'Amnesty International pour venir en Algérie ou encore les relations bilatérales avec la Tunisie et la Palestine ont également été abordées. Sur les médias, M. Messahel a clairement dit «l'ouverture médiatique est définitive. La prolifération des chaînes de télévision dépendra du cahier de charges. Plusieurs lois (audiovisuel, publicité, sondage) vont bientôt passer à l'APN. Nous avons besoin d'encadrer la profession selon des normes internationales et avoir ainsi un partenaire fort». M. Lamamra indiquera quant à lui que les services de l'Etat sont fortement mobilisés pour libérer les otages «j'étais avec les familles des diplomates pour les soutenir et leur assurer que nous suivons les évolutions des événements et que nous sommes sur le terrain, mobilisés pour libérer nos diplomates». A propos des prisonniers algériens en Irak, il affirmera «nous sommes en contact permanent avec les autorités de ce pays qui nous ont assuré que le dossier est minutieusement traité. Les formalités sont presque terminées. Nous sommes prêts à nous rendre en Irak et nous nous attendons à recevoir, à n'importe quel moment, une personnalité de ce pays frère». Sur la demande d'Amnesty, le ministre de la Communication a juste rappelé que l'Algérie étudie toutes les demandes qui lui parviennent des ONG «il n'y a pas un refus de principe». Enfin les deux ministres ont évoqué les bonnes relations de l'Algérie avec la Tunisie et la Palestine et son soutien à ces pays frères. H. Y. Constitution :«Bouteflika décidera de l'opportunité et du timing» Questionné sur la très attendue révision de la Constitution, Abdelkader Messahel, ministre de la Communication a rappelé que le Premier ministre a déjà indiqué que le rapport de la commission chargée de la révision de la Constitution a été remis au président de la République. «Le choix de l'opportunité et du timing pour la révision de la Constitution relèvent des prérogatives exclusives du président de la République. C'est le chef de l'Etat qui va décider». H. Y. À propos de Saïdani :«Des questions seront posées à la prochaine réunion du FLN» Les déclarations tenues par Amar Saïdani, le secrétaire général du FLN ont fait beaucoup de remous. A la question de savoir si ces déclarations ne renseignent pas sur une crise au niveau de l'Etat, le ministre de la Communication a indiqué «Saïdani est Secrétaire général d'un parti politique. Le gouvernement applique et réalise le programme du président de la République. Il s'agit-là, d'un problème qui relève d'un parti politique. Je suis moi-même membre du comité central du FLN et nous tiendrons une réunion le 16 du mois en cours. Des questions seront certainement posées». H. Y.