Les membres du gouvernement ne ratent aucune occasion pour exhorter l'administration à se mettre au diapason des aspirations légitimes du citoyen algérien. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, dans toutes les wilayas qu'il a visité ces derniers mois, a sèchement dénoncé les lenteurs administratives qui brident toutes sortes d'initiatives salvatrices pour le pays. Récemment, le patron du Conseil national consultatif pour la promotion de la PME avait qualifié l'administration algérienne de «bête, méchante et sale». L'homme s'insurge ainsi contre les pesanteurs et les inerties qui alourdissent le processus de mise à niveau des entreprises économiques. Oui, la bureaucratie est sur toutes les lèvres. Politiciens, investisseurs, journalistes et simples citoyens sont unanimes à mettre le doigt sur la plaie. Dans certaines wilayas, comme à Khenchela et Oum El Bouaghi, des citoyens ont investi la rue pour dénoncer les abus et les travers de l'administration locale. Le ministre chargé de la Réforme du service public, Mohamed El Ghazi, reconnaît la justesse de ces actions de masse qui réclament plus d'efficacité, de transparence et d'équité dans la prise en charge des affaires de la collectivité. «Il est du devoir de l'administration d'offrir des prestations de qualité pour tous les Algériens, car si elle (administration) existe, c'est pour servir le citoyen», avait-il déclaré dernièrement au cours d'une visite de travail dans la wilaya de Boumerdès. Faisant part de la volonté de l'Exécutif à remédier à ce problème, M. El Ghazi a, par la même occasion, promis une nette amélioration dans quelques mois. Cependant, la réforme profonde et durable de l'administration ne saurait se faire sur de simples instructions. Fondamentalement, il s'agit de décentralisation des pouvoirs et des prérogatives, de formation des ressources humaines, de prise en charge des revendications sociales du corps des fonctionnaires. Dans les communes, les daïras et les wilayas, le nombre de contractuels, de pré-employés et d'inscrits au filet social reste très important. Au préalable, ce personnel, précarisé et sous-payé, doit être correctement pris en charge. «Le problème de l'administration publique est un problème de conception organisationnelle. Une organisation est un système de coopération. Sans coopération on n'a pas d'organisation, et le rôle des dirigeants est de créer et de maintenir la coopération...Là aussi, il y a beaucoup de formation à faire», analyse le professeur Tayeb Hafsi, dans les colonnes de La Tribune. Il considère que le petit fonctionnaire, en raison d'une organisation archaïque, est aujourd'hui mal informé, mal formé, mal traité et, par conséquent, se montre peu coopératif. Pour le Pr Hafsi, il ne suffit pas d'instruire, il faut une action perpétuelle et une recherche permanente d'harmonie. Pour s'assurer que l'idée contenue dans la décision (ordre, instruction) devienne une réalité, «il faut convaincre tout le monde, organiser les choses, former, mettre en place des mécanismes d'accompagnement et d'évaluation des résultats...». Le souci majeur consiste à créer une dynamique d'ensemble où chaque fonctionnaire, soumis à une obligation de résultat, serait mis devant ses responsabilités. Le wali, le chef de daïra, le secrétaire général de la commune, le directeur de l'Exécutif, le ministre, entres autres grands commis de l'Etat, sont les premiers responsables de cette situation déplorable de l'administration algérienne. Ils doivent rendre des comptes, exactement comme on est en train de le demander avec insistance aux petits fonctionnaires. Sans cette exigence fondamentale, toute tentative de réforme serait vaine et vouée à l'échec. K. A.