Un mort. Encore un. C'est un de trop. Cette fois la victime est un jeune de trente ans qui a rendu l'âme vendredi dernier à l'hôpital de Ghardaïa. Il a succombé à ses blessures. Il avait été grièvement touché à la tête lors des affrontements dans la petite ville de Guerrara (120 km au nord-est de Ghardaïa), fin novembre dernier. La cause de cette explosion de violence, qui a fini par le décès d'un homme, en sus des blessés et des saccages, est l'hostilité entre supporters de deux équipes de football locales, hostilité entretenue par le conflit séculaire sous-jacent entre les communautés Mozabites et Chaambas. Et il aura fallu l'intervention des forces de l'ordre dépêchées sur les lieux pour mettre fin aux heurts. Ce n'est pas la première fois que les frictions intercommunautaires finissent par des affrontements. Il suffit d'un rien pour que le différend qui remonte à l'époque où les premières tribus mozabites, des commerçants et des agriculteurs, se sont installées dans la région habitée par les tribus pastorales et semi-nomades chaambies, ressurgisse. C'est la rivalité qui a toujours existé entre pasteurs, guerriers nomades pratiquant les rezzou, et agriculteurs, sédentaires et, relativement, pacifistes. Mais ça remonte à des siècles déjà, et, logiquement, l'évolution des mentalités, le progrès, la vie collective, la communauté des besoins, des acquis et des défis auraient dû influer positivement sur les rapports entre les groupes d'individus. Il n'en est rien. Le drame est que cette hostilité latente n'est pas propre aux Mozabites et Chaambas seulement. Des affrontements entre supporters ou entre quartiers ont déjà eu lieu dans différentes villes du pays. On a déjà eu mainte fois à déplorer des morts, des blessés et des dégâts matériels dans des batailles rangées entre groupes de jeunes ou émeutes, et souvent l'étincelle qui provoque l'explosion de violence est causée par une broutille : un étal sur un marché informel, des places de parking sauvage dans une rue, ou, pire, un territoire de gangs. Dans tous les cas, seule l'intervention musclée des forces de l'ordre arrive à rétablir un calme précaire. A qui la faute ? Qui est responsable de ces débordements de violence dans les rapports sociaux ? En prenant le raccourci, on dira que c'est le recul de l'Etat. Pourtant, les effectifs de la police et de la gendarmerie sont plus que renforcés et ces deux corps ont fait un maillage très serré du territoire. La réponse n'est donc pas à chercher dans la présence policière, mais dans l'implication de l'Etat dans la gestion des rapports sociaux, qui impose une politique réfléchie dans l'administration des espaces de vie. Les socio-ethnologues expliquent que, comme pour un pays, un quartier a une histoire à laquelle s'identifient ses habitants, si ces derniers sont déménagés, déracinés, ils transposeront leur quartier et leur mode de vie dans leur nouvel espace d'habitat et y délimiteront leur territoire. Là se dessineront les lignes de fracture et surgiront les conflits qu'il faut gérer en amont si on veut éviter d'avoir à traiter la violence en aval. H. G.