Le gouvernement ukrainien a démissionné hier, tandis que le Parlement a abrogé une série de lois répressives pour tenter de régler la crise que traverse l'Ukraine dont l'UE et la Russie devaient aussi débattre à Bruxelles. Le président Viktor Ianoukovitch a accepté la démission du Premier ministre Mykola Azarov et par conséquent de l'ensemble des ministres, dans un décret publié sur le site Internet de la présidence. Le gouvernement actuel continue cependant à gérer les affaires courantes en attendant la formation d'une nouvelle équipe, y est-il précisé. «J'ai pris la décision de demander au président d'accepter ma démission du poste de Premier ministre, pour créer les conditions supplémentaires d'un compromis politique et d'un règlement pacifique du conflit», avait quelques heures plus tôt annoncé M. Azarov. «Ce n'est pas la victoire, mais un pas vers la victoire», avait alors réagi Vitali Klitschko, l'un des principaux chefs de l'opposition. «Cela calmera les gens pendant un mois au plus. Nous devons maintenant casser le système», a également déclaré l'ex-champion de boxe au journal allemand Bild Zeitung. Au Parlement, réuni depuis la matinée en session extraordinaire, les lois du 16 janvier qui répriment presque toute forme de manifestation, ont été abrogées. Elles avaient été fermement dénoncées par les Occidentaux et ont entraîné la radicalisation du mouvement de contestation né du refus du président ukrainien fin novembre de signer un accord de libre-échange avec l'UE, y préférant un rapprochement avec Moscou, ce qui a été vécu par beaucoup comme une trahison. Cette législation prévoyait des peines allant jusqu'à cinq ans de prison pour le blocage des bâtiments publics et des amendes ou une détention administrative pour les manifestants portant des masques et des casques, comme de nombreux contestataires actuellement à Kiev. Elle punissait par ailleurs de travaux d'intérêt général les auteurs de diffamation sur l'Internet, ce qui a été vu comme une forme de censure. 361 députés ont voté l'abrogation de ces lois, deux contre, un résultat accueilli par de nombreux applaudissements dans la salle, où le Parti des régions de Viktor Ianoukovitch est majoritaire. La séance a ensuite été ajournée jusqu'à 14h00 GMT. Les élus doivent alors notamment débattre d'une amnistie des manifestants interpellés pendant les heurts avec la police. Une minute de silence avait été observée en début de séance à la mémoire des personnes tuées à Kiev dans les récentes violences (trois selon un bilan officiel). Européens et Russes, qui s'accusent mutuellement d'ingérence dans les affaires intérieures de l'Ukraine, se sont retrouvés pour un bref sommet s'annonçant largement dominé par la situation dans cette ex-république soviétique. Le président Vladimir Poutine, arrivé en début d'après-midi à Bruxelles, accompagné du ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, devait s'y entretenir avec les principaux responsables de l'UE, dont Catherine Ashton, le numéro un de la diplomatie européenne. Cette dernière partira ensuite pour une visite de 48 heures à Kiev, où elle doit rencontrer le chef de l'Etat ukrainien, ainsi que les dirigeants de l'opposition. Côté américain, le vice-président Joe Biden a prévenu M. Ianoukovitch, au cours d'une conversation téléphonique, que «décréter l'état d'urgence ou prendre toute autre mesure sécuritaire aussi sévère ne ferait qu'aggraver la situation». Dans la capitale ukrainienne le calme était revenu après les incidents, parfois violents, des semaines précédentes. Hors de Kiev, le siège de l'administration de près de la moitié des régions est toujours occupé par les contestataires qui réclament le départ des gouverneurs nommés par le chef de l'Etat. Les négociations entre le président, qui a fait des concessions, et l'opposition s'étaient intensifiées ces derniers jours. Toutefois, Arseni Iatséniouk, chef de file des députés de la formation Patrie de l'opposante emprisonnée Ioulia Timochenko, a formellement refusé lundi soir le poste de Premier ministre que lui avait proposé samedi M. Ianoukovitch. R. I.