C'est au cœur d'Alger, dans un immeuble situé à quelques pas de lieux symboliques, le square Port Saïd et le Théâtre national algérien, que les amateurs d'art ont été conviée au vernissage, samedi dernier, de l'exposition «Picturie générale 2», dans l'espace baptisé «La Baignoire», afin de découvrir l'exposition collective d'une quinzaine d'artistes dans différents styles, supports et démarches esthétiques. C'est dans une ambiance conviviale et chaleureuse que s'est déroulé le vernissage de l'exposition, marqué par la présence de nombreux artistes confirmés, à l'instar de Zoubir Hellal, mais également des personnalités du cinéma et de l'univers littéraire à l'instar de Samira Negrouche, ainsi que de nombreux anonymes. Les présents ont pu ainsi découvrir de nombreuses œuvres dans des styles aussi différents que la sculpture, la peinture, le photomontage, des installations ainsi que du art-vidéo s'inscrivant de plein-pied dans une démarche contemporaine, tant par la forme que par le fond. Ainsi la plupart des œuvres empruntent aux nouvelles technologies les outils de créations esthétiques afin de poser de véritables problématiques et questionnements sur l'existence de l'individu et du monde qui l'entoure. C'est dans cette démarche de réflexion, où l'art va au-delà d'une simple approche esthétique, une démarche subversive pour dénoncer le mal-être de toute une génération face au temps qui passe, l'image de la femme, le foot instauré comme religion, la Harga et l'amer constat de l'artiste éternellement maudit dans une société matérialiste où l'essence de l'être est réduite à un tas de chair mercantiliste. Parmi les nombreux exposants aux talents prometteurs, Rafik Kachba, dont l'exposition intitulée «Qui ment à qui ?», où, avec des matériaux de récupération naturels tels que des feuilles mortes étalées par terre, des bouts de troncs d'arbres, il a fabriqué une sorte de chaise intemporelle, faisant face à un tableau accroché au mur illustrant un cerisier en fleur aux couleurs tendre et pastel des promesses d'un printemps lointain, telle une illusion dans le constat amer des espoirs qui s'envolent et décrépissent tels les feuilles mortes et un bois dénué de toute sève régénératrice. Une installation qui laisse ouvertes toute les lectures, tant sur le plan politique, philosophique que poétique. Dans le même registre des désillusions, mais avec des matériaux plus froids et métalliques, Walid Aïdoud, à travers ses trois tableaux au graphisme sur aluminium, illustre la détresse de l'être en entremêlant le métal, la couleur des expressions torturées et quelques lignes d'écriture qui traverse ce monde sombre et obscur. Dans un autre registre et dans un impressionnant grand format de trois mètres sur trois mètres et demie, Maya Benchikh El Fegoun offre au regard une image surréaliste et détournée des odalisques dans des couleurs flashy, où des femmes au formes sensuelles a demi-nues, dans des postures parfois grotesques accentuées par la proximité de truies roses, interpelle le regard tant par la complexité des signifiants qui s'en dégagent que par le talent de l'artiste qui joue avec les canons esthétiques ainsi que le concept de la femme objet ou le désir ambigu est souvent conjugué avec répulsion. Deux thèmes marquants de la jeunesse algérienne, à l'instar du foot, ironiquement détourné, ainsi que la terrible thématique de l'émigration clandestine «les Harraga», dans l'œuvre de Sofiane Dougga, qui sculpte des pieds en résine sur un astrolabe illustrant tout le gouffre des siècles qui séparent l'âge d'or des sciences arabes et celui où partir est devenu la seule obsession des jeunes. Au final, l'exposition collective est très intéressante tant par la pluralité des styles que par la multiplicité des lectures et des thèmes qu'elle propose, d'autant plus que le lieu de l'exposition est en lui même une curiosité. «La baignoire» est en fait le siège de Team consulting international, situé à l'entrée de Bab Azzoun, et qui n'est «ni une galerie d'art ni un espace culturel. C'est un concept d'espace partagé qui, régulièrement, propose au monde de l'entreprise de coexister avec la sphère culturelle dans ses formes les plus diverses». Ainsi, ce lieu se veut un espace de partage qui permettra à l'avenir de faire cohabiter et coexister le monde de l'entreprise avec la sphère culturelle dans ses expressions les plus diverses : expos, installations, happenings, ateliers, lectures... S. B.