Récit imaginaire d'une Afrique prospère qui accueille des millions de réfugiés autrichiens, canadiens, américains, norvégiens… et autres qui fuient une Euroamérique terrassée par la famine et la misère. L'Afrique est belle et prospère, l'Euroamérique est pauvre et malade. La première offre une belle image de paix et d'abondance, la seconde compte ses morts et ses misères. Abdurahman Waberi renverse le monde et inverse la situation dans son dernier livre les Etats unis d'Afrique paru aux éditions Jean Claude Lattès, en 2006, et réédité aux Editions Chihab en avril dernier. L'auteur djiboutien rêve d'une Afrique eldorado et raconte sa beauté et ses richesses dans un langage poétique et sensuel mais aussi satirique. Provocateur et polémique. Waberi parle avec des mots simples mais lourds de sens pour dire son dégoût de ces images de misère, de guerre, de pauvreté, d'insuffisance… qu'on associe, souvent, aux pays d'Afrique. L'Afrique réelle, celle d'aujourd'hui. «Que l'Africain soit démuni naturellement, ça je ne l'accepte pas», a-t-il déclaré, mardi dernier, avec ferveur et insistance, lors d'une rencontre autour de son livre au centre culturel français (CCF) d'Alger. L'invité du CCF, surnommé «le révolté» par Le Clezio, prix Nobel 2008 de littérature, réaffirme son rejet de toutes ces choses négatives qui accompagnent le mot Afrique (guerres, famine, pauvreté, maladies, corruption…) : «J'en ai marre de toutes choses négatives qu'on dit de notre Afrique.» «J'ai imaginé, j'ai inventé… mais j'ai aussi parlé de choses vraies.» L'auteur narrateur utilise un personnage féminin qu'il ne décrit pas physiquement. Maya, appelée Malaïka pour son innocence angélique, est donc le personnage principal du roman à qui l'auteur s'adresse par le «tu» pour raconter son histoire, ses malheurs, ses frustrations. En fait, Maya n'est autre que l'auteur lui-même : Abdurahman Waberi l'Euro-africain. Mais on devine que le «tu» par lequel il s'adresse à elle est le substitut de son «je», écrit l'écrivain-journaliste, Rachid Mokhtari. Elle est son double, peut-être même sa conscience, poursuit-il. Ce livre de 200 pages mérite absolument d'être lu. «Beau roman soutenu par une musique, ici violente, là élégiaque, des mots passionnels, incantatoires, qu'inspire Maya, la figure angélique dans un monde délabré», écrit encore Rachid Mokhtari. «J'estime que c'est un roman indispensable pour lire le monde», soutient, de son côté, Mme Yasmina Belkacem des éditions Chihab, en réponse à une question relative à la réédition de ce livre. K. M. Waberi, un auteur prometteur Abdurahman A. Waberi est né à Djibouti en 1965. Il a quitté son pays, en 1985, pour poursuivre des études d'anglais aux universités de Caen et de Dijon en France. Il est l'auteur de plusieurs recueils de nouvelles et romans dont le Pays sans ombre, Cahier nomade et Balbala. Son premier ouvrage le Pays sans ombre, paru en 1994, a obtenu de nombreuses distinctions dont le grand prix de la nouvelle francophone de l'Académie royale de langue et littérature françaises de Belgique. Son œuvre est traduite en une dizaine de langues. K. M.