Le Brésil met les bouchées doubles pour être à l'heure du Mondial dans, exactement, dix-huit jours. Le pays de la samba cumule les retards dans la préparation et la mise en place des équipements prévus pour la Coupe du Monde 2014. La Fifa, sur des charbons ardents, multiplie les visites d'inspections sur les chantiers et presse les organisateurs d'aller encore plus vite pour ne pas compromettre l'entame de la messe planétaire du ballon rond. Il y a seulement quelques jours, quatre stades, sur les douze arènes réservées à l'événement sportif le plus suivi au monde, étaient encore en travaux, dont celui de Sao Paulo où se tiendra le match d'ouverture, Brésil-Croatie, le 12 juin prochain. Des tribunes, des vestiaires et des installations annexes restent encore à parachever. Dans nombre de villes organisatrices on a aussi accusé des lenteurs dans la mise en place des infrastructures de base comme des lignes de tramway, le chemin de fer ou l'élargissement des aéroports. Le roi Pelé se dit à la fois préoccupé et gêné par cette situation. «Il est inacceptable que certains stades ne soient pas encore prêts», a-t-il déclaré récemment à un journal allemand, en soulignant que son pays avait eu largement le temps pour finaliser tous les préparatifs dans les délais. En effet, le Brésil savait depuis sept ans qu'il sera le prochain organisateur de la Coupe du Monde et avait un cahier des charges à concrétiser dans ce sens. Au début de l'année en cours, le patron de la Fifa avait implicitement reproché cela aux autorités brésiliennes. «Le Brésil a commencé ses préparatifs beaucoup trop tard. C'est le pays le plus en retard depuis que je suis à la Fifa, et pourtant c'est le seul qui avait autant de temps - sept ans - pour se préparer», a déclaré Joseph Blatter dans les colonnes d'un quotidien suisse. A cette entame tardive des travaux, les manifestations sociales, qui secouent le pays depuis plus d'une année, ont énormément nui à la bonne conduite des projets. Au mois de juin 2013, durant la Coupe des Confédérations, des centaines de milliers de personnes étaient descendues dans les rues des grandes villes brésiliennes pour protester contre la mauvaise qualité des services publics, le chômage, l'insécurité, la corruption et les grandes dépenses consacrées à l'organisation du Mondial. Depuis, ce mouvement de contestation ne cesse de prendre de l'ampleur pour revendiquer l'amélioration des conditions de vie. Le budget de 11 milliards de dollars dégagé pour l'organisation du Mondial est jugé excessif par les populations des favelas qui vivent dans des conditions extrêmement difficiles. Les protestataires estiment qu'avec autant d'argent ils ont le droit de prétendre, aussi, à une nette amélioration de leur quotidien (éducation, santé, création d'emplois). Cette situation explosive inquiète sérieusement l'instance mondiale du football, les 32 nations participantes, les grandes figures de la discipline et les fans du jeu à onze. A la mi-mai, un conseiller spécial du comité d'organisation déclare, au cours d'une conférence à Mexico, que 25% des étrangers qui avaient prévu de venir au Brésil ont annulé leur voyage. Des légendes vivantes du foot, comme Michel Platini et Ronaldo, ont appelé les Brésiliens à l'apaisement pour faire de ce Mondial 2014 une grande fête. «Je suis un optimiste, pas un peureux. Le football sera protégé, je crois que les Brésiliens n'attaqueront pas le football directement. Car chez eux, c'est une religion», rassure le patron de la Fifa, Joseph Blatter. K. A.