Les politiques budgétaires renseignent en profondeur sur la volonté politique de réduire les nombreuses inégalités socioéconomiques, de renforcer l'ancrage culturel par des investissements privés et publics pour la diffusion, la formation et le rayonnement de la culture nationale. Au plan interne, l'épanouissement et la diffusion sur l'ensemble du territoire des productions artistiques et culturelles se mesurent d'année en année à travers les paramètres aussi bien physiques que financiers, irréfutables, qui servent de censeurs fiables dans un espace national. Ces paramètres sont totalement ignorés, sinon occultés par les pouvoirs publics, les élites et les professionnels dans les arts majeurs, l'édition, la fiscalité et le volume des investissements et des recettes annuels. On égrène au fil des conjonctures le générique des activités, les festivals nationaux ou dits internationaux, les concerts donnés, des troupes étrangères qui passent dans une ville ou dans un centre culturel étranger et on passe à autre chose jusqu'au bouclage d'un semestre ou d'une année d'activités qui se perdent dans un bilan administratif. Ce dernier n'est d'aucune utilité, sauf pour les espaces, les collectivités locales ou des ministères qui organisent un semblant de vie et de productions culturelles ou artistiques. La pénurie totale d'une culture des chiffres et des statistiques, pour ce qui est de tous les champs culturels, institue la seule activité au statut de politique culturelle qui ne s'encombre d'aucun calcul, au sens de la rentabilité, à tous les niveaux et d'aucune perspective planifiée et rendue publique. La pyramide des budgets ministériels à chaque loi de finances est un indicateur précieux pour apprécier la pertinence des sommes consenties aux investissements. Le nombre de kilomètres de routes, de postes, de barrages, de logement, valide des politiques publiques. Le chiffrage donne à voir un panorama des familles logées ou relogées, le maillage des P et T, des routes , etc. Pour la culture, personne ne sait exactement le nombre exact de salles de cinéma, de théâtres, de cours de danse, de musées, encore moins le nombre de fauteuils par discipline et le nombre de consommateurs payants par année. Les chiffres et statistiques balisent des évolutions quantitatives et financières tout en mesurant, par la fréquentation informatisée, à un strapontin près, la pratique culturelle par genre, par région, par mairie, par campus, etc.Cependant, la politique à l'œuvre, devant la rareté des infrastructures, qui creuse les inégalités entre certaines grandes villes et le reste du pays, érige «l'invitation» en genre économique. Par conséquent, pour un concert, un film, une pièce de théâtre, les créateurs, les managers et les producteurs (privés/publics) ne savent jamais le nombre de spectateurs payants qui ont vu leur travail et honoré leurs énergies. C'est encore les démembrements de l'Etat vache à lait qui paient, y compris pour ceux qui ont les moyens. Ces derniers ne paient jamais leur place mais ils y vont pour que leurs proches et amis leur disent le lendemain : «On t'a vu au journal télévisé». Un système informatisé à chaque guichet, relié à un centre comptable, pourrait donner en temps réel le nombre de spectateurs et les sommes encaissées. Mais on serait dans la modernité économique. A. B.