En s'engageant, en juin dernier, à jouer le rôle de médiateur, dans la résolution de la crise politico-armée malienne, l'Algérie a soulagé l'Union Africaine et l'Organisation des Nations unies d'une lourde tâche. Convaincre les autorités de Bamako et les groupes politiques-militaires du Nord-Mali à revenir à la table des négociations, après une énième rébellion des Touareg n'a pas été une partie de plaisir, mais cela ne constitue qu'une étape dans ce travail de réconciliation des parties maliennes, toujours sur le qui-vive en cas de reprise des hostilités. La médiation burkinabé, celle de l'Organisation de la Communauté de développement des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) avait déjà balisé le terrain pour permettre aux Maliens de renouer un dialogue sérieux et concret autour de toutes ces questions qui fâchent depuis six décennies. Et cela ne fait que commencer, car il reste encore du chemin à faire, au milieu d'un terrain miné. En effet, le Mali est face à des choix difficiles qui n'arrangent pas forcément tous les Maliens qui craignent de voir leur pays vivre un scénario à la Soudanaise. Si les rebelles du Nord ont momentanément abandonné l'idée de l'indépendance de l'Azawad, ils demeurent inflexibles sur la définition d'un statut clair de ce territoire où Bamako ne dispose d'aucun contrôle réel sur le destin d'une région longtemps marginalisée et dont les révoltes ont été sévèrement matées par les précédents gouvernements maliens. Réaliser une paix durable dans le cadre d'un Mali fédéral où l'Azawad aura plus d'autonomie dans la gestion des affaires courantes, de son économie et de son développement social, est le vœu des groupes politico-armés qui négocient à Alger, dans le cadre du dialogue inclusif inter-malien qui a fixé comme condition préalable à toute discussion le respect de l'unité du Mali et de l'autorité de l'Etat malien. En attendant la reprise des pourparlers, qui ont marqué une pause du 24 septembre jusqu'au 17 octobre prochain, une question mérite d'être posée : l'action diplomatique est, certes, d'un poids important dans le retour de la paix dans le Nord-Mali, mais comment peut-on maintenir ce climat de paix revenue, si le dialogue d'Alger arrive à convaincre les groupes rebelles à déposer les armes ? Au cœur des discussions d'Alger, il y a les questions liées à l'économie et au développement social du Nord-Mali, tout comme les négociations ont prévu un volet culturel et un volet pour la réconciliation nationale, au sein de trois autres commissions de travail, en plus évidemment de la commission politico-sécuritaire. Il est bien beau de voir Bamako s'engager à consentir davantage d'efforts dans le développement des provinces du Nord, mais tout se fait avec de l'argent. Sauf que Bamako ne dispose pas de cet argent nécessaire à la mise à niveau de l'Azawad. Le Mali vit de l'aide de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international qui ont suspendu leurs financements en juin dernier, en raison d'une gestion qualifiée de floue de leur argent par Bamako. Cette dernière a fait commande, au début de l'année en cours, d'un nouvel avion présidentiel, tout comme il a contracté des marchés d'achat d'armement en ayant recours au douteux procédé du gré à gré. La réussite du dialogue d'Alger constitue un point de départ d'un travail concret sur le terrain, dont l'Algérie sera partie prenante pour apporter sa contribution à l'édification d'un nouveau Mali et à la stabilisation de l'ensemble de la région du Sahel. Mais la communauté internationale aura à prendre le relais sur le terrain, en accompagnant les autorités maliennes à mettre en œuvre l'accord final du processus d'Alger, en veillant à ce qu'il soit aussi respecté par les groupes politico-armés de l'Azawad. Par ailleurs, il y a la donne des groupes terroristes de la mouvance islamiste qu'il ne faudrait pas perdre de vue. Dans les coulisses des discussions d'Alger, les leaders touareg et arabes de l'Azawad sont tous unanimes à penser que la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique, contre Ansar Eddine et le Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest est possible dans un Mali en paix entre Bamako et les populations du Nord. Car, ces groupes armés islamistes ont profité de la faiblesse de l'Etat malien, de l'instabilité en Libye et du fragile équilibre politique et sécuritaire dans tout le Sahel pour étendre leur territoire, voire rallier de nombreux chefs de tribus qui se disent être victimes de la marginalisation politique, économique et sociale des autorités centrales de leurs pays. L. M.