«Je t'aime, moi non plus.» Cette phrase affirmative, mais en même temps à la forme négative, résume, on ne peut mieux, les rapports télévision-football ou inversement à travers le monde. C'est admettre honnêtement que les turbulences qui marquent ces mêmes rapports en Algérie ne sont pas son strict apanage. Persister dans le sens contraire serait faire un procès de mauvaise intention à l'endroit des responsables nationaux à tous les échelons décisionnels. Pourtant, il semble aussi trop péremptoire et pratiquement risqué d'affirmer que les dirigeants de la FAF, de la télévision et des clubs algériens n'aient pas leur part de responsabilités dans cette sorte d'incompréhension qui mine leurs rapports dans tous les sens. Ailleurs, c'est-à-dire un peu partout à travers le monde, le problème s'est posé, se pose mais trouve une solution, voire des solutions en ce sens qu'acteurs et prestataires de services sont des entités indépendantes, en général, relevant du droit privé ou plus ou moins excepté évidemment les fédérations et la Ligue nationale de football qui, comme leur nom l'indique, sont parties intégrantes du secteur public dont elles restent dans le giron et fonctionnent en vertu des textes, règlements généraux et lois spécifiques. Ailleurs aussi, les chaînes de télévision investissent dans le sport, plus particulièrement le football, qui a ravalé dans les profondeurs toutes les autres formes de spectacle. Elles n'hésitent pas à investir des sommes colossales, et l'idée ne date pas d'il y a un quart de siècle seulement avec l'arrivée de Canal+ comme semblent le croire nos compatriotes. La chaîne a effectivement ouvert d'autres horizons aux spectateurs algériens mais rien que de nouveaux horizons, depuis élargis avec la gamme de chaînes nouvelles toutes nationalités confondues et qui naissent encore chaque mois. Mais la première rencontre de football télévisée remonte au 30 avril 1938 (challenge-Cup anglaise) et elle est une performance à mettre au compte de la BBC. Toutefois, le football devant plus à l'engouement populaire direct vécu sur place que face au tube cathodique, seulement 10 000 téléspectateurs ont suivi la rencontre contre 93 437 qui ont fait le déplacement à Wembley. Ce qui n'aurait jamais été le cas, en Algérie, dans la mesure où les fans de football et quel que soit leur attachement à une équipe donnée n'hésitent pas l'ombre d'une seconde à opter pour une rencontre à suivre à la télévision plutôt qu'au stade, et ce, quels qu'en soient l'importance, l'enjeu et la qualité des protagonistes, à un degré moindre celle de la sélection nationale et seulement quand celle-ci a le vent en poupe. Là également le problème n'est pas spécifiquement algérien. Aussi bien en Angleterre, en Hollande, en Italie ou en Allemagne, les chaînes de télévision ont rencontré d'énormes difficultés à diffuser sur le tube cathodique des rencontres et les affrontements entre des clubs donnés et ces institutions ont fait couler beaucoup d'encre. Mais cela remonte quand même à près de 70 ans. Une question de manque à gagner pour de mièvres affiches Déjà, sur le plan commercial, une équipe du championnat national dont le match est transmis à la télévision part avec plusieurs longueurs de retard sur son adversaire : le manque à gagner financièrement parlant, le manque à gagner moral en l'absence de supporters et des promesses très hypothéquées de pouvoir gagner en retour avec le bailleur de fonds intermédiaire, en l'occurrence, l'instance sportive nationale supposée procéder au dispatching du pactole ramassé chaque année. Une attente, somme toute, des plus légitimes à laquelle ne semblent pas s'astreindre la fédération nationale, sinon à un train de sénateur ou encore par une compensation à valeur d'obole. Mais par opposition à ce point de vue, la télévision dont l'activité qu'elle soit sportive, politique, culturelle est avant tout de nature informative en ce sens qu'un match de football enregistré ou livré en direct ne relève que de la simple information à laquelle nul, en fait, n'est tenu de suivre et ce, d'autant plus avec la disponibilité de centaines d'autres chaînes grâce aux satellites. Pour quelle raison l'institution paierait-elle une prestation qui, contrairement à celles à payage, n'est pas quantifiable sur les plans financiers et audience ? Forcément, la crise ne peut qu'être en fin de parcours ou à la reprise de la compétition eu égard aux difficultés de financement des clubs. Et ce n'est finalement que la répétition de ce qui s'est déjà passé sous d'autres cieux en d'autres temps. Est-ce à dire que les rapports tendus entre toutes les parties ne sont qu'un passage obligé ? Vraisemblablement, oui ! Toutes les situations de crise sont suivies d'accalmie, les négociations aboutissant inéluctablement à un modus vivendi, une feuille de route fût-elle limitée dans le temps (c'est d'ailleurs l'essence même de n'importe quel deal) et, par voie de conséquence, révisable en temps opportun dès lors que le football a été pris en otage par le spectacle, un tribut hélas réel à payer d'autant plus que les clubs algériens travaillent, aujourd'hui, sur du velours en raison du désengagement, même partiel, de l'Etat de la prise en charge de certaines pour ne pas dire essentielles contingences matérielles. Reste, maintenant, à savoir s'il existe une équité entre clubs en matière de rencontres télévisées, si la qualité du plateau vaut la peine de la retransmission et surtout si celle-ci a un grand impact. En l'absence d'une mesure de l'audimat, il relève de la plus grande prétention de s'aventurer à confirmer une bousculade de ce dernier. A. L.