Se jouera, se jouera pas ? Au Maroc ou ailleurs ? La tenue de la 30e édition de la Coupe d'Afrique des Nations (CAN 2014), qui devrait (devait ?) se dérouler au Maroc du 17 janvier au 8 février prochains, se conjugue désormais au conditionnel. Le Royaume chérifien, désigné comme pays hôte du plus prestigieux rendez-vous footballistique continental, a saisi, le 10 octobre dernier, la Confédération africaine de football (CAF) pour demander le report de la compétition à une date ultérieure. La raison? La propagation du virus Ebola qui a causé plus de 4 000 décès suscitant toutes les craintes chez le pays voisin. Cette demande intervient à la suite de «la décision du ministère (marocain) de la Santé d'éviter les rassemblements auxquels prennent part des pays touchés par le virus Ebola», comme précisé dans le communiqué transmis à l'instance footballistique. Il faut dire qu'à trois mois de la date initiale prévue pour l'ouverture du tournoi, cette demande vient mettre la CAF dans l'embarras chamboulant le calendrier des compétitions et hypothéquer la tenue d'un évènement majeur dans l'agenda du sport à onze en Afrique. Une date importante avec tout ce qu'elle peut représenter au double plan sportif et financier. Cependant, le pays organisateur ne veut pas prendre de risque face à une épidémie aux allures dévastatrices qui pourrait l'empêcher d'abriter la CAN pour la deuxième fois de son histoire. Le Maroc a déjà organisé l'édition de 1988 remportée pour le Cameroun. À l'époque l'Algérie avait terminé sur la 3e marche du podium en battant justement les Lions de l'Atlas (1-0) lors de la petite finale. Par ailleurs, l'appréhension marocaine vis à vis d'Ebola n'est pas nouvelle. Fin août dernier, le gouvernement marocain avait déjà annoncé la mise en place d'une «commission nationale» chargée de préparer un «plan sanitaire» contre ce dangereux virus dans la perspective de cette même CAN, une épreuve à laquelle devraient participer seize nations. C'est pour dire que le sujet était pris très au sérieux par les autorités de ce pays. Dans ce contexte, il faudra néanmoins reconnaître que cette nation a affiché une solidarité à toute épreuve envers les pays touchés par l'épidémie, en permettant –notamment- à la Guinée, où Ebola fait des ravages, de jouer ses matchs de qualifications à Casablanca. En outre, la compagnie nationale Royal Air Maroc est la seule à avoir maintenu des liaisons aériennes avec les pays frappés de plein fouet par cette maladie contagieuse. La CAF en position de force Malgré les délais très courts pour pouvoir trouver un «substitut» pour l'organisation de la messe du football, l'instance de Issa Hayatou, qui a décidé dans un premier temps de maintenir les dates prévues initialement tout en prévoyant des réunions pour le début du mois de novembre avant la fin des éliminatoires, semble avoir d'autres cartes en main. Un «coup de théâtre» qui ne semble pas vraiment déstabiliser la première structure continentale du «jeu à onze». En effet, au cas où les Marocains décideraient de renoncer officiellement à organiser la manifestation, la CAF devrait solliciter l'Afrique du Sud pour remplacer son homologue marocaine. Les Sud-africains ne sont, ni plus ni moins, que les derniers organisateurs en date (la défunte CAN-2013) de la compétition. Un «joker» avec lequel elle pourrait faire pression sur les Marocains qui pensaient peut-être bénéficier de la souplesse de la Confédération surtout dans de pareilles circonstances. Seulement, les alternatives, ils semblent y avoir et dans ce cas de figure, la solution étant simple: le désistement. N'empêche, le gouvernement marocain ne semble pas l'entendre de cette oreille. Si des rumeurs ont circulé annonçant que le Maroc a décidé tout simplement de renoncer à l'organisation de la Coupe sur ses terres, son ministre des Sports, Mohamed Ouzzine, a tenu à préciser que le renoncement n'était pas à l'ordre du jour: «On n'a pas encore tranché. C'est une question qui va être traitée avec les responsables de la CAF (...). Nous avons convenu de nous réunir autour d'une table pour discuter ensemble des options techniques de cette demande de report». Les enjeux sont énormes. Le Maroc dispose de deux choix : céder à la pression de la CAF et écorner sa souveraineté ou prendre une sage décision (quoi que l'on dise) et ... courir de lourdes pertes et sanctions. Le Maroc pourrait être privé de disputer deux éditions de la CAN ainsi que l'exclusion de ses catégories jeunes de toutes compétitions en plus de courir une grosse amende financière. L'Afrique du Sud : le recours par excellence «Aujourd'hui c'est une question de choix, de responsabilité historique». Les mots sont forts et illustrent parfaitement les enjeux. Les véritables, parce qu'il ne s'agit plus de performances sportives, mais plutôt de la stabilité et la sécurité de tout un pays conscient du risque qu'il pourrait courir. La demande marocaine a été établie en fonction du dernier rapport de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), où «il est question de chiffres et de dimension alarmante quant à la propagation du virus», précise M.Ouzzine. Selon les dernières infos (le site officiel du magasine espagnol Marca), le Royaume serait plutôt enclin à se «débarrasser» du costume d'organisateur. La CAF, secouée, n'a pas tardé à réagir. Son secrétaire général, Hicham Al-Amrani, aurait même adressé une lettre à plusieurs pays qui stipule qu'«en cas de refus du Maroc de conserver l'organisation de la compétition aux dates prévues, la CAF voudrait savoir si votre Fédération serait volontaire et aurait les moyens d'organiser la Coupe d'Afrique des Nations-2015». Dans ce contexte, l'Afrique du Sud s'impose comme le recours par excellence pour ce cas de figure. En effet, le Pays de Nelson Mandela a déjà joué les sauveurs en 1996 et récemment en 2013. En effet, la terre des «Bafana Bafana» a remplacé le Kenya lorsqu'il n'avait pas les moyens financiers pour honorer son statut d'organisateur. Par la suite, elle s'est manifestée pour être la capitale du football africain au moment où l'instabilité politique régnait en Libye. On ne doute pas que la CAF trouvera des solutions pour éviter que la fête soit gâchée. Les Lions pourraient rester dans leur tanière Si les 15 pays qualifiés seront connus au mois de novembre prochain (l'Algérie et le Cap Vert seront déjà au rendez-vous), le 16e pays devait être le pays hôte : le Maroc (jusque là) en l'occurrence. Alors que l'Afrique du Sud, annoncée comme éventuel suppléant, est presque qualifiée, les calculs pourraient par conséquent être faussés si jamais le pays hôte était redésigné. Le règlement stipule que la nation organisatrice est qualifiée d'office. Or, les «Lions de l'Atlas» n'ont pas fait la campagne des qualifications et ça ne serait ni équitable ni légitime de les voir jouer la prochaine CAN sans passer par l'épreuve des éliminatoires. On imagine mal comment d'autres pays accepteraient que Younès Belhanda et consorts participent au tournoi directement. Dans ce contexte, la CAF a indiqué qu'elle pourrait procéder à un tirage au sort pour désigner celui qui abritera l'une des joutes majeures du football universel. Même si beaucoup n'adhèrent pas à cette idée, une solution logique et qui satisfait tout le monde doit être trouvée dans les plus brefs délais. Le Maroc, pourrait perdre gros et payer cher sa position intervenue tardivement, chamboulant par conséquent les plans et le calendrier de l'organisation de Hayatou. Les Verts, expéditifs lors des qualifications, sont assurés de prendre part à la prochaine CAN. Où et Quand ? Ils ne le savent pas encore. Il faut dire que chez nos voisins, l'apport du public serait conséquent puisque les supporters algériens comptaient s'y rendre en masse. Wait and see parce que la situation devrait se clarifier dans les jours à venir. M. T.