De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Même en l'absence de statistiques fiables, il est juste de dire que les enfants, en Algérie, sont maltraités partout où ils sont censés être bien accueillis et protégés contre toutes les formes de violence psychologique, physique, sexuelle et autres. On peut voir le nombre incroyable d'enfants qui sont des SDF, font la manche, jugés par les tribunaux et placés par le juge des mineurs dans des centres de détention aux côtés de délinquants récidivistes et dans des centres «spécialisés» qui ne conviennent pas à cette frêle catégorie de détenus ou de victimes des soubresauts de la vie familiale et d'un environnement marqué par près de vingt ans de terrorisme. Du foyer familial à l'école en passant par la rue et les salles de détention pour mineurs, les enfants souffrent et sont soumis, souvent, violemment à l'omerta des adultes qui les considèrent comme des victimes expiatoires des maux de la société. Ils sont violentés dans le silence et la non-dénonciation. Selon des chiffres récents du ministère de la Famille et de la Condition féminine, 80% des familles algériennes infligent des violences physiques à leurs enfants. A l'école, la violence est presque institutionnalisée du fait des préjugés de la société qui croit que le châtiment corporel est un moyen efficace et systématique d'éducation. Ce traitement violent est transposé par la majorité des éducateurs croyant bien faire et qui recourent aux violences psychologiques et physiques pour transférer le savoir et les bonnes manières. Dans ce cas, les enfants ne font que perpétuer dans les enceintes de l'enseignement l'idée qu'ont les parents sur la façon de donner une éducation à leurs enfants et qui n'est autre que la soumission des petits à la loi du bâton pour leur éviter de tomber dans «le mauvais chemin» de la déperdition scolaire et de la délinquance. Au bout du compte, les adultes ne font que pousser les enfants droit dans ces pièges d'où il est très dur de les tirer. La plupart des éducateurs se protègent derrière des «textes» et pensent qu'il n y a pas de loi en Algérie qui interdit le châtiment corporel et ils continuent à faire subir aux élèves les sévices physiques dans les salles de classe, les cours de récréation et à proximité des établissements scolaires. Ils font subir ainsi des humiliations et des séquelles indélébiles aux enfants. Le tribunal criminel de Tizi Ouzou a eu à juger à la fin de l'année dernière une affaire liée à la mort d'une fillette de dix ans, mort provoquée par un «éducateur» près de l'établissement scolaire. Des écoliers jouaient et s'amusaient devant l'école et un enseignant dérangé par ces scènes ordinaires de joie n'a pas trouvé mieux que de balancer un bout de bois atteignant grièvement à la tête une petite fillette qui sera transférée à la polyclinique pour les premiers soins. Voyant que l'état de leur fille se dégradait, ses parents l'ont transférée au CHU Nedir Mohamed où elle décédera quatre jours plus tard après une intervention chirurgicale infructueuse. L'absence d'associations actives de défense de l'enfance fait que beaucoup de silence entoure les violences faites aux enfants. Les campagnes de sensibilisation peuvent aider à sauver les enfants des comportements abusifs des adultes. Si la Convention internationale des droits de l'enfant considère que la maltraitance est «toute forme de violence, d'atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d'abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d'exploitation, y compris la violence sexuelle», on pourrait affirmer que les associations ont fort à faire dans un pays où les droits de l'homme les plus élémentaires sont bafoués sous prétexte de terrorisme.