Selon une étude parue en janvier 2015 dans la revue Science, pour parvenir à endiguer la hausse des températures en deçà de 2°C d'ici à 2100, il faudrait laisser sous terre 80% des réserves d'énergies fossiles connues. Associées à l'amélioration de l'efficacité énergétique dans tous les usages (bâtiment, transport, industrie), les énergies renouvelables (EnR) représentent donc la principale voie de progrès. Les énergies modernes innovent De surcroît, comme le souligne régulièrement Nicolas Hulot, en accroissant l'autonomie des Etats, elles limitent le risque de conflits liés à l'approvisionnement énergétique. Des fours aux lampes solaires, toutes sortes de solutions pénètrent les pays en développement pour permettre aux villages non connectés de s'affranchir de leur dépendance au fioul et au charbon. Total, GDF Suez ou encore Schneider Electric sont particulièrement actifs sur ces marchés. L'hydroélectricité, développée de longue date dans les économies matures où il ne reste guère de sites propices, constitue aujourd'hui l'immense majorité des capacités renouvelables installées et présente encore un fort potentiel de développement dans les pays émergents (Chine, Brésil, Afrique...). Mais ce sont les EnR «modernes» qui recèlent le plus d'innovations. Le solaire a battu en 2013 un nouveau record de 39 GW et atteint une capacité mondiale installée de 140 GW, en concordance avec les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie, qui y voit la première source d'énergie au monde d'ici à 2050 (photovoltaïque et thermique confondus). En attendant, les acteurs continuent à rechercher l'amélioration des rendements tout en travaillant à la mise en point de nouveaux matériaux et en imaginant de nouveaux usages. Des innovations toujours plus ingénieuses Outre les traditionnels panneaux en silicium cristallin (90% du marché), les chercheurs s'intéressent aux couches minces qui permettent de transformer en sources d'énergie des matières souples et légères. Le français SunPartner a mis au point un photovoltaïque transparent utilisé sur les écrans de téléphones portables Alcatel, du mobilier urbain ou des stores d'avion. Il prépare aussi des matériaux souples et coordonne le consortium Soltex, qui planche sur un fil photovoltaïque. En ligne de mire, des textiles générateurs d'électricité qui pourraient être utilisés pour fabriquer des vêtements, des stores, les toits de serres agricoles, des garnitures intérieures de véhicules, etc. Tout ce qui contribue à rapprocher les sources d'énergie des points de consommation et à tendre vers l'autonomie de certains équipements (des téléphones portables aux bâtiments) a le vent en poupe, car cela permet de réduire les investissements dans les infrastructures de transport. Par manque de sites propices dans les pays développés, la croissance du photovoltaïque de demain proviendra plutôt d'une multiplicité de toitures commerciales ou résidentielles, que de grandes centrales au sol comme cela a été le cas jusqu'à présent. Aux Etats-Unis, des sociétés comme SolarCity ou SunRun rivalisent de solutions de financement innovantes permettant aux particuliers de s'équiper sans bourse déliée. Dans un autre registre, plusieurs entreprises (l'Américain Solar Roadways ou le Néerlandais SolaRoad) incrustent les routes de cellules solaires dans le but d'alimenter les panneaux signalétiques mais aussi les véhicules électriques y circulant. D'autres planchent sur le moyen de récupérer l'énergie de l'air déplacé par les voitures ou les trains le long des autoroutes ou des voies ferrées. Des investissements par centaine de milliards Dans l'éolien (près de 320 GW installés dans le monde à la fin 2013), l'innovation vient en se jetant à l'eau. De la mer du Nord au Japon, mais aussi au large des côtes françaises, les projets en mer se multiplient, comme en témoignent les investissements records de 19 milliards de dollars (16,5 milliards d'euros) en 2014. Après une première génération d'éoliennes posées au fond des mers grâce à des fondations gigantesques, apparaissent les premières turbines flottantes, qui permettent de s'éloigner des côtes et de profiter de régimes de vents plus favorables. D'autres technologies visent à exploiter les énergies marines, celle des vagues, celle des courants (marins et fluviaux), et même l'énergie thermique que produit la différence de température entre les eaux de surface et celles des profondeurs. Fort de son expertise marine, le Groupe industriel français DCNS est présent dans toutes ces filières, dans lesquelles de nombreuses start-up (Sabella, Hydroquest, Nénuphar, Ideol...) testent également leurs inventions. Moins visible, l'innovation se niche aussi dans les réseaux électriques. Les diverses composantes des réseaux électriques intelligents (développées par les géants Schneider Electric, Alstom, ABB ou Siemens) permettent d'absorber la production des EnR tout en assurant l'équilibre entre production et consommation : une meilleure prédictibilité des consommations et des productions solaire et éolienne grâce aux mégadonnées, le pilotage de la recharge des véhicules électriques qui pourraient devenir demain des solutions de stockage, ou encore des solutions d'effacement permettant d'agréger la consommation de plusieurs acteurs (spécialité de la filiale de Schneider Electric, Energy Pool ou d'Actility pour les sites industriels ou de Voltalis pour les particuliers) et de la décaler dans le temps afin de lisser les pointes... Le stockage, aujourd'hui le principal obstacle à un développement plus rapide des EnR, n'est pas en reste, que ce soit à l'initiative de grands Groupes (Areva, Alstom) ou de plus petites structures (le Français McPhy, spécialiste de l'hydrogène solide, ou l'Américain Aquion Energy qui a séduit Total...) Avec des investissements de 310 milliards de dollars (262,4 milliards d'euros) en 2014, proches du record de 2011 (317 milliards de dollars), les énergies vertes n'ont pas fini d'innover et de se développer. D. P. In latribune.fr