L'accord de paix et de réconciliation au Mali a été signé hier à Alger, mais sans la Coordination des mouvements de l'Azawad, qui a demandé un délai de quelques jours «pour expliquer la teneur de ce document aux populations du Nord-Mali», a déclaré son porte-parole Brahim Ag Saleh à l'hôtel El-Aurassi où s'est déroulée la cérémonie de clôture du 5e round du dialogue inclusif inter-malien. «Considérant l'impérieuse nécessité de parvenir à un accord global et définitif pour mettre fin au conflit qui oppose l'Azawad à l'Etat du Mali (...)», la CMA «demande à la Médiation internationale de lui accorder le temps et le soutien nécessaire pour partager de bonne foi le projet d'accord avec les populations de l'Azawad dans un délai raisonnable avant tout paraphe», lit-on dans la déclaration de la Coordination regroupant le Mouvement national de libération de l'Azawad (Mnla), le Haut conseil pour l'unité de l'Azawad (Hcua), le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA), la Coordination pour le peuple de l'Azawad (CPA) et la Coordination des Mouvements et Fronts patriotiques de résistance (CM-FPR). Interrogé, en marge de cette cérémonie, le porte-parole de la CMA, Mouloud Ramdane, a expliqué que les mouvements belligérants tiennent à leur principale revendication qu'est la «reconnaissance de l'appellation de l'Azawad» par le gouvernement malien. «Nous n'avons pas pris les armes pour rien. Nous voulons une définition claire du statut de l'Azawad et une reconnaissance politique et juridique» de ce territoire du Nord-Mali, a ajouté le porte-parole de la CMA. Interpellé à ce propos, maître Harouna Toureh, le porte-parole de mouvements pro-Bamako de la Plateforme d'Alger, a répondu, en tant que juriste, qu'il est «impossible d'introduire le moindre article dans le document que nous avons signé ce matin. Aucune virgule ne sera ajoutée». Ce qui risque donc de conduire la CMA à ne pas signer cet accord et ouvrir la voie à un nouveau cycle de violences armées, craint-on. L'accord en question n'inclut pas, en effet, la notion de fédéralisme ou d'autonomie, et il ne fait nullement référence à l'adoption d'un statut particulier de l'Azawad. Ce pourquoi des manifestations ont eu lieu samedi à Kidal, en signe de rejet de ce document qui a été signé par onze pays et organisations continentales et internationales qui ont fait partie de la médiation internationale. Malgré l'enthousiasme affiché par le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, et le discours conciliant de son homologue malien, un grand scepticisme entoure cet accord de paix qui constitue le résultat d'un long et âpre dialogue, engagé depuis juillet 2014. Ce dialogue n'aurait pas été possible si les membres de la CMA ne s'étaient pas engagés à respecter l'intégrité territoriale du Mali et l'unité nationale des Maliens, dont une partie s'oppose à toute discussion avec les groupes armés du Nord. Etant donné que chaque partie a des comptes à rendre à ses partisans, il serait peut-être tôt pour certaines parties de crier victoire, car les véritables obstacles ne font que commencer. Même si le document de la médiation algérienne sera signé par la CMA, sa mise en œuvre ne sera pas du tout facile. Outre tous ces ressentiments qui ont été nourris par des décennies de conflit armé, entre Bamako et les populations du Nord-Mali, il y a une autre donne à prendre en considération. Il s'agit des groupes islamistes armés, dont Ansar Eddine d'Iyad Ag Ghali. Ce leader islamiste, aux connexions douteuses avec ses congénères touaregs de la CMA, est soupçonné par de nombreuses parties de tirer les ficelles pour empêcher la conclusion d'une paix durable au Mali. L. M.