D'après des opérateurs membres de l'Association nationale des exportateurs algériens (Anexal), que la Tribune a pu joindre par téléphone pour en savoir un peu plus sur la promotion des exportations hors hydrocarbures, de toutes les décisions prises depuis 2007, année où les pouvoirs publics ont commencé à se pencher sérieusement sur la problématique, pas plus de 10% d'entre elles ont été appliquées sur le terrain. «Ce qui veut dire que la volonté des décideurs de promouvoir les exportations hors hydrocarbures existe uniquement dans le discours et non sur le terrain», déplore-t-on du côté de l'Anexal. C'est devenu d'autant plus évident pour l'association au point où de nombreux membres ne cessent de le marteler à chacune de leurs sorties médiatiques. Ces derniers ont souvent montré du doigt l'administration censée les accompagner dans leurs démarches. Car, selon eux, «elle leur crée des embûches plus qu'elle ne les aide». Ils citeront particulièrement le fameux dispositif appelé «couloir vert» qui, diront-ils, a montré toute ses limites. Toujours dans le registre des contraintes, des membres de l'Anexal nous ont dit que les conditions actuelles ne permettent pas l'émergence d'entreprises exportatrices, notamment avec l'obligation de rapatriement des dividendes dans un délai de six mois sous peine d'interdiction des opérations de commerce extérieur et de poursuites judiciaires. «Cette mesure du Conseil national de la monnaie et du crédit plombe les exportations», soutiennent-ils. C'est pourquoi nos interlocuteurs proposent de «dépénaliser l'acte d'exporter» et de «mettre à niveau le cadre réglementaire régissant les exportations». Ces derniers estiment par ailleurs que pour augmenter les exportations hors hydrocarbures, le gouvernement doit faire un effort, notamment au niveau de l'amélioration de l'environnement des entreprises afin de créer les conditions favorables à leur développement à l'international. Pourtant, faut-il le souligner, une initiative dans ce sens avait été introduite à l'époque. En effet, en 2009, un groupe pilote d'environ 40 entreprises du secteur public et privé ont bénéficié d'un accompagnement personnalisé de deux ans pour un programme d'actions sur mesure à l'international appelé «challenge optimexport». Depuis, on a appris que cette louable initiative n'a pas connu de suite alors qu'il était prévu dans le cadre du «challenge optimexport» qu'un autre groupe d'entreprises algériennes exportatrices ou potentiellement exportatrices allaient être sensibilisées, formées et orientées dans leur conquête de marchés étrangers. Cette initiative devait permettre de consolider les entreprises exportatrices existantes et soutenir d'autres pour s'engager dans cette voie. Ce qui n'a pas été le cas. D'autres démarches ont été également proposées afin de booster les exportations hors hydrocarbures. Une nouvelle démarche prônée par la Caisse de garantie des exportations (Cagex), mais qui comporte des conditions. Selon des responsables de la Cagex l'augmentation des exportations passe inéluctablement par la multiplication du nombre d'entreprises productives et la disponibilité des produits en quantité et qualité selon les normes mondiales. C'est pourquoi «l'enjeu actuel est de créer un grand nombre d'entreprises productives qui peuvent exporter leurs produits face à la rude concurrence», avait souligné le président-directeur général de la Caisse, Djilali Triket, lors d'un séminaire sur la «Promotion des exportations». «Cela peut se faire dans la mesure où l'Algérie dispose des moyens humains et matériels ainsi qu'un dispositif dans ce cadre pour réaliser cet objectif à moyen et long termes», ajoutera-t-il. Il est utile de rappeler que, selon la Cagex, quatre exportateurs réalisent 83% des exportations hors hydrocarbures de l'Algérie jusque-là. C'est dire la faiblesse de la contribution des autres entreprises en matière d'exportation. Ce nombre réduit d'exportateurs s'explique selon des responsables de l'Agence nationale de la promotion du commerce extérieur (Algex) par plusieurs facteurs. «Les entreprises disposent d'un marché national qui est rémunérateur et n'ont pas souvent la volonté d'aller vers l'exportation, à cela s'ajoute l'absence au niveau des pouvoirs publics d'une stratégie et d'une vision d'intégration dans les espaces économiques en Algérie et dans les accords d'association ayant été signés», nous a-t-on fait savoir. On apprendra également de nos interlocuteurs que la majorité de nos entreprises ont naturellement la logique du profit et ne vont pas aller vers des espaces extérieurs, du moment qu'elles disposent d'un marché national. Une tendance qui se confirme à travers la structure actuelle de nos exportations. On retrouve seulement trois entreprises qui exportent régulièrement et avec des expéditions de plus en plus importantes en matière de tonnage. Ce sont les entreprises Fertial, Cevital et Somiphos, alors que le ministre du Commerce, Amara Benyounès, lors d'une de ses dernières sorties sur le terrain, avait annoncé que de nombreuses entreprises sont en mesure de se placer à l'international. Mais leurs patrons n'affichent pas d'intérêt pour le volet exportation de leurs productions. Un désintérêt sur lequel il est devenu temps de se pencher sérieusement. Dans cette perspective il est annoncé qu'une nouvelle stratégie va être mise en place. C'est d'ailleurs Amara Benyounès qui l'a annoncé à partir de Béjaïa où il était en visite de travail jeudi dernier. Les grands axes de la nouvelle stratégie seront exposés durant une conférence nationale qui va se tenir la fin du mois prochain et à laquelle sont conviées les organisations patronales, l'Ugta, les industriels ainsi que tous les acteurs gravitant autour du commerce extérieur, pour débattre et examiner les possibilités d'amélioration de l'acte d'exportation, et surtout sortir avec une stratégie nationale claire et efficace pour qu'enfin les exportations hors hydrocarbures connaissent un saut quantitatif, ou tout au moins atteindre la barre des 10 milliards de dollars par an à moyen terme. Et au vu des potentialités existantes, cela peut se réaliser, à condition que toutes les parties prenantes s'impliquent pour la concrétisation de cet objectif, car c'est devenu d'un intérêt majeur pour l'avenir économique du pays. Z. A.