Le Yémen a basculé encore une fois dans une guerre qui va détruire irrémédiablement les infrastructures et faire des milliers de morts notamment parmi les civils. Autant de dévastations pour un pays déjà en proie à de grandes difficultés économiques et sociales. La capitale yéménite Sanaa a subi hier les raids aériens les plus violents depuis le début des bombardements de la «coalition arabe» menée par l'Arabie saoudite. Le discours des Etats arabes engagés dans la campagne se veut guerrier et résolument anti-iranien. Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Saoud al-Fayçal, a eu des mots particulièrement durs pour les «nouveaux ennemis» que certains médias s'échinent à décrire comme la véritable menace contre le monde arabe. Le mouvement Houthis, Ali Abdallah Saleh et l'Iran, sont aujourd'hui tenus pour responsables du conflit au Yémen par Riyadh et ses alliés. Le quotidien saoudien Al-Watan a lancé une attaque au vitriol contre l'Iran, en mettant en garde les pays arabes «contre une réaction possible de leur voisin» à l'opération au Yémen. Les diatribes anti-iraniennes détonnent pourtant avec le terrain où c'est bien l'Arabie saoudite qui effectue des bombardements sur le territoire yéménite et non l'Iran qui s'est limité à dénoncer l'action militaire et de prévenir que «l'attaque met en danger toute la région». Le Yémen se retrouve de nouveau le théâtre d'une guerre par procuration qui sera payée par les yéménites. A Sanaa, des habitants ont fait état de raids nocturnes très violents. Les bombardements se multiplient au fil des jours faisant s'éloigner une possibilité de solution politique, tant les positions des différents acteurs vont aller en se durcissant. L'objectif affiché de «la coalition» menée par l'Arabie saoudite, qui comprend une dizaine de pays arabes, est de stopper le mouvement Houthis dans son évolution et par ricochet affaiblir une influence supposée de l'Iran. Mais les opérations militaires commencent déjà à produire de sérieux dommages notamment parmi les civils. Le porte-parole saoudien de la coalition, le général Ahmed Assiri, a d'ailleurs implicitement reconnu la responsabilité de la coalition dans le raid qui a fait au moins 40 morts et 200 blessés lundi dans un camp de déplacés à Al-Mazrak, au nord-ouest du Yémen. Dans le Sud, au moins 40 personnes, en majorité des civils, ont péri dans de nombreuses attaques et violences. Près de Lahej, une cimenterie a été touchée par des obus d'origine indéterminée, faisant 20 morts parmi des ouvriers. Selon un bilan de source médicale, 13 autres personnes ont péri dans la nuit à Aden par des tirs d'obus : six civils et sept supplétifs de l'armée, favorables au président Abdrabbou Mansour Hadi réfugié en Arabie saoudite. La confusion règne dans la ville du Sud. Le Haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme a déclaré craindre un «effondrement total» du Yémen. «La situation au Yémen est extrêmement alarmante, avec des dizaines de civils tués au cours des quatre derniers jours». Dans «l'Arabie heureuse» c'est vraiment le temps de la guerre. M. B./Agences