Les cours du pétrole ont rechuté jeudi dernier à New York et Londres, après l'annonce d'un accord de principe sur le nucléaire iranien qui laisse craindre une aggravation de la surabondance de l'offre. Le prix du baril de pétrole pour livraison en mai a perdu 95 cents, à 49,14 dollars, à la clôture sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), au lendemain d'une envolée provisoire. À Londres, le cours du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai a chuté plus lourdement de 2,15 dollars, à 54,95 dollars, sur l'Intercontinental Exchange (ICE). Selon certains analystes, le marché, qui avait les yeux braqués sur les négociations de Lausanne depuis plusieurs séances, a réagi comme il était prévisible en faisant encore baisser les cours de peur que cet accord entraîne un afflux de brut iranien dans un marché déjà saturé. Depuis 2012, les exportations de pétrole iranien, faut-il le rappeler, ont été sévèrement limitées par les sanctions qui ont réduit les revenus de Téhéran. En faisant pression pour une levée des sanctions, les représentants iraniens ont insisté sur le fait qu'ils pourraient rapidement faire passer la production du brut du pays de 2,7 millions à 4 millions de barils par jour, et ainsi exporter davantage vers leurs clients en Asie. En effet, des acheteurs potentiels en Chine et en Inde ont exprimé leur intérêt pour un nouvel accès au brut iranien bon marché. En attendant, l'Iran possède environ 30 millions de barils de pétrole (soit une dizaine de jours de production) entassés sur des tankers, en attente d'être déversés sur le marché. «L'Iran a au moins 30 millions de barils de pétrole à bord de superpétroliers. En d'autres termes, il peut mettre sur le marché un million de barils par jour supplémentaires pendant au moins un mois si les sanctions sont levées, sans même avoir besoin d'accroître sa production», selon les spécialistes de Commerzbank, citant des sources dans le milieu des armateurs. Un tel afflux de pétrole, dans un contexte où les cours sont déjà déprimés par la surabondance de l'offre, ne pourrait que les pousser encore plus à la baisse, alors qu'ils ont décliné de plus de moitié depuis juin. Dans une déclaration à RIA Novosti, le directeur de l'agence PetroleumWorld Elio Ohep, a, pour sa part indiqué: «Les Iraniens ont accumulé suffisamment de pétrole produit selon les quotas de l'Opep, qu'ils ne pouvaient pas vendre auparavant. Si on ouvre cette vanne, le marché sera inondé et les prix peuvent chuter.» Selon lui, l'évolution de la situation dépendra de l'offre et de la demande. Toutefois, Richard Mallinson, analyste chez Energy Aspects, à Londres, pense que les obstacles qui persistent dans le secteur pétrolier iranien privé d'investissements ne vont pas disparaître du jour au lendemain. Ainsi, il faudra des mois pour démêler les sanctions pétrolières, faire repartir les gisements iraniens fatigués et organiser des contrats frais avec des acheteurs en Asie. Ce qui limite la quantité de pétrole supplémentaire que l'Iran sera capable de pomper et d'exporter à quelques centaines de milliers de barils par jour à moyen terme, d'après Richard Mallinson qui estime que «certes c'est du pétrole en plus, mais ce n'est pas un raz-de-marée». Certains analystes pensent que le seul espoir de voir les cours se redresser reste l'éventualité d'une aggravation des tensions au Yémen et les risques qui peuvent en découler sur la distribution du pétrole, si les détroits de Bab El Mandeb et d'Ormuz venaient à être fermés. B. A./Agences