De nombreux pays exploitent activement l'énergie géothermique aussi bien pour la production d'électricité que pour d'autres utilisations. En Algérie, la balnéothérapie demeure pratiquement la seule utilisation directe de cette énergie. Pourtant notre pays dispose de plus de deux cent sources chaudes réparties sur la partie nord du pays. Un tiers environ (33%) d'entre elles ont des températures supérieures à 45°C. Il existe même des sources à hautes températures pouvant atteindre 118°C à Biskra. Des études sur le gradient thermique national ont permis d'identifier trois zones dont le gradient dépasse les 5°C/100m. Il s'agit des zones Relizane et Mascara, Aïn Boucif et Sidi Aïssa et enfin la zone de Guelma et Djebel El Onk. Certes, l'Algérie est décidée à diversifier son économie, pour se libérer de sa forte dépendance de la rente pétrolière, en se tournant, entre autres, vers le développement des énergies renouvelables dont l'énergie géothermique. Toutefois, il semble que l'Etat, qui projette de réaliser 4 500 MW à partir des ENR d'ici 2020, ne mise pas assez sur la géothermie. En effet la répartition dudit programme, par filière technologique, fait ressortir que sur les 4 500 MW à réaliser, seuls 15 MW seront produits à partir de l'énergie géothermique, soit 0,33% de la capacité globale à produire d'ici 2020. Outre l'utilisation de la géothermie dans le secteur de l'énergie, l'Etat ne semble pas aussi focaliser son intérêt sur la géothermie pour le développement du secteur de l'agriculture. Pourtant, l'énergie géothermique, selon le dernier rapport de la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture) «offre des opportunités exceptionnelles pour la production et la transformation rentables et durables des aliments dans les pays en développement». «Dans certaines économies en développement, la moitié de toute la nourriture produite se perd durant la phase après récolte - en partie à cause d'un manque d'énergie abordable pour la transformation des aliments», relève le rapport Uses of geothermal energy in Food and Agriculture, publié hier. Ainsi, l'utilisation de l'énergie thermique, selon la FAO, s'avère particulièrement «intéressante» pour sécher les aliments, pasteuriser le lait et stériliser les produits dans les pays en développement, où la transformation des aliments renforcera la sécurité alimentaire. L'énergie géothermique est aussi une source principale de chauffage pour les serres agricoles et les sols, et d'eau pour l'aquaculture, précise le rapport. «En utilisant une source d'énergie propre, on affronte non seulement les coûts mais aussi les impacts environnementaux de la production et de la transformation des aliments», souligne Carlos da Silva, économiste principal à la Division FAO des infrastructures rurales et agro-industries. Et si les hydrocarbures sont onéreux et rares dans certaines parties du monde, les 42 millions de mégawatts (MW) estimés qui irradient du centre de la terre, où règne une température de 5 000°C, ne sont pas près de s'épuiser, souligne encore le rapport. Quid de l'utilisation de la géothermie dans le secteur agricole en Algérie ? «L'énergie géothermique pour l'agriculture peut être appliquée à petite échelle et contribuer sensiblement à la création de revenus, offrant des emplois et améliorant la sécurité alimentaire et nutritionnelle dans les pays en développement», ajoute Divine Njie, directrice ajointe AGS à la FAO et co-rédactrice du rapport. Il faut savoir qu'à l'échelle mondiale, 38 pays appliquent déjà l'énergie géothermique directement à la production agricole et quelque 24 pays l'exploitent pour générer de l'électricité dont l'Islande, le Costa Rica, El Salvador, le Kenya, la Nouvelle-Zélande et les Philippines qui tirent plus de 10% de leurs besoins en électricité des sources de chaleur naturelle. Sur les 23 pays en développement utilisant l'énergie géothermique, la majorité l'applique actuellement à des fins de chauffage et de loisirs (baignade), sans exploiter son énorme potentiel pour les utilisations agricoles. Mais des projets d'agriculture géothermique sont en cours dans presque la moitié de ces pays, notamment dans les domaines de l'aquaculture, de l'agriculture et de l'agroalimentaire, note la FAO dans son rapport. C'est le cas de l'Algérie qui a lancé en février dernier une nouvelle technique pour le développement du secteur de l'agriculture à partir de la géothermie. Cette technique, jusque-là jamais utilisée en Algérie, est ainsi lancée, dans la vallée de Oued Righ à Touggourt, dans la wilaya de Ouargla. Il s'agit d'un projet issu de la coopération algéro-espagnole. Ce projet vise ainsi à produire les légumes hors-saison dont une grosse quantité sera destinée à l'exportation. Il sera réalisé par l'Office national d'irrigation et du drainage (Onid), en partenariat avec deux sociétés espagnoles, à savoir le Groupe Tragsa et Alcantara Systems. Ce projet de 1 milliard de dinars, qui s'étale sur une superficie de 250 hectares, consiste à la réalisation et à la mise en exploitation d'un complexe agro-industriel de production de primeurs par l'utilisation de la géothermie. Un exemple à méditer. B. A.