Les travaux du congrès constitutif du nouveau né Talaiou El Houriet de l'ancien chef du gouvernement et candidat aux présidentielles de 2004 et 2014, Ali Benflis, se sont ouverts hier, à l'hôtel Hilton (Alger), en présence d'anciens ministres et de personnalités politiques connues sur la scène nationale. La plupart étant de «la grande famille de l'opposition nationale», cette opposition «légitime, responsable et résolue que n'anime aucun autre motif et aucune autre considération sinon le progrès pour notre pays et le bonheur pour notre peuple», dira Benflis à l'ouverture des travaux. Le discours de Benflis, d'une durée de 50 mn, était précédé par ceux de Sofiane Djilali, au nom de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique, et de Tahar Benbaïbèche au nom du Pôle des forces du changement. Le premier d'une durée de dix minutes, le second d'un quart d'heure environ. L'un et l'autre, virulents et sans ambages, chargeant le pouvoir en place et les gouvernants, les accusant d'être derrière tous les problèmes dont souffre la société algérienne. Benbaïbèche a sévèrement critiqué les partis pro-pouvoir, particulièrement le FLN, et a dénoncé la lettre de félicitations adressés par Gaïd Salah à Amar Saâdani, le secrétaire général du FLN. Entre autres personnes présentes à ce congrès, attendu depuis des mois et par les militants et par ces personnes qui, sans adhérer au parti, affichent clairement leur opposition au pouvoir en place, on retrouve d'anciens ministres : Ahmed Benbitour, Abdelmadjid Attar et l'ancien ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, ce dernier est membre fondateur de Talaiou El Houriet et désigné comme le n°2 du parti. L'on y aperçoit également deux anciens chefs du gouvernement, à savoir Belaïd Abdesselam, ce dernier était aussi présent à l'ouverture des travaux du FLN (Front de libération nationale), et Mokdad Sifi. Un autre ancien ministre, Bougherra Soltani du MSP (Mouvement de la société pour la paix) à côté de Abderrezak Mokri du même parti. Le MSP, contrairement à il y a quelques années, est aujourd'hui dans le camp des opposants. Autres personnalités politiques, Ali Yahia Abdenour, 90 ans passés, l'avocat Mokrane Aït Larbi et l'ancien secrétaire général du FFS (Front des forces socialistes) Karim Tabou, aujourd'hui fondateur d'un autre parti, toujours dans le camp de l'opposition. L'on remarque aussi la présence de Djahid Younsi, Abdallah Djaballah, Kamel Bouchama, Mohamed Arezki Ferrad...et d'autres encore, en plus de l'enseignant universitaire Ahmed Adhimi qui est responsable au sein du nouveau parti. Ajoutés à ceux-là, d'anciens officiers supérieurs et officiers généraux de l'armée. L'on note, par exemple, la présence du général Mohand Tahar Yala, en tant qu'invité. Le général à la retraite n'est pas membre du parti de Benflis, mais lui aussi a son projet politique pour «le changement» en Algérie. Son initiative politique, il en a déjà parlé à travers la presse et compte la promouvoir davantage dans les mois à venir. Sur le même ton virulent et accusateur, Ali Benflis, dans son discours, a dénoncé le système politique en place qui reste le même, alors que la société n'arrête pas de subir des changements, selon ses dires. «Dans notre système politique, il n'y a de place que pour un pluralisme politique maîtrisé, contrôlé et asservi et aucune pour un pluralisme politique qui se conçoit comme contre-pouvoir ou comme pourvoyeur de projets politiques différents... Notre système politique a l'ouïe musicale particulièrement délicate : il n'accepte qu'une seule partition -la sienne- et ne tolère aucune voix discordante ou note dissonante», a-t-il affirmé. Aussi, «notre système politique n'a pas seulement rendu problématique la création de partis politiques. Il a aussi jeté le discrédit sur l'action politique, sur la pratique politique et sur le militantisme politique lui-même. Le système politique national a tout fait pour faire descendre le militantisme de son piédestal. Le militantisme qui se déploie en dehors du cercle restreint de ses clientèles est pour lui douteux et suspicieux. Bien plus, il l'assimile souvent à un comportement antipatriotique». Dans le même contexte, le leader du nouveau parti Talaiou El Houriet s'élève aussi contre la vacance du pouvoir : «L'Algérie vit une vacance du pouvoir qu'il est inutile de tenter de cacher par des procédés les uns plus vains et plus dérisoires que les autres. Les institutions sont illégitimes de la base au sommet du fait du fléau de la fraude qui a, lui aussi, pris une dimension systémique. La vacance du sommet de l'Etat a produit son effet boule de neige et ce sont toutes les institutions constitutionnelles qui se sont retrouvées en situation de quasi-cessation d'activités. Toute l'administration publique est entrée en léthargie faute d'orientations et de directives. Le vide généré par la vacance du pouvoir a été comblé par des forces extraconstitutionnelles qui ont pris possession du centre de décision nationale.» Benflis considère que «la République est menacée dans ses fondements, que l'Etat national est fragilisé, que la cohésion de la Nation est mise en danger et que les équilibres les plus essentiels de notre société sont sérieusement atteints». Partant, «c'est l'alternative démocratique et elle seule qui pourra donner le signal de départ du renouveau politique, économique et social de notre pays». Toutefois, malgré les critiques, malgré la colère, Ali Benflis estime que les solutions aux problèmes existent et cela pourrait se faire sans heurts et sans violence : «Le règlement de toutes ces crises existe; il est possible sans heurts et sans ruptures. Ce règlement est en chacun d'entre nous et sa réalisation est un devoir collectif. Ce règlement est à portée de nos mains. Il n'exige que la sagesse, la lucidité et le courage des hommes de bonne volonté. Et c'est par la sagesse, la lucidité et le courage que se construisent les grandes nations.» Pour ce faire, il affirme miser sur la jeunesse et sur la femme. L'espoir, dit-il, est permis. «L'histoire de notre nation elle-même est une grande leçon d'espoir. Et c'est de cette grande leçon d'espoir que nous devons tirer tous les enseignements pour le présent et pour l'avenir. Après chaque échec, après chaque défaite, après chaque revers, cette nation a toujours su puiser au plus profond d'elle-même la résilience, la force morale et les ressources inépuisables qu'elle porte en elle-même pour se relever, résister, triompher des adversités, continuer à avancer et ne jamais abandonner sa place parmi les autres nations. Face aux revers, à l'échec, à la défaite ou à l'adversité», a-t-il soutenu. K. M.