Dans son rapport sur le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord, paru lundi dernier, l'ONG International crisis group (ICG) qui a évoqué le cas Algérie, a estimé que «l'Algérie est en passe de devenir un intermédiaire indispensable de la stabilité en Afrique du Nord et au Sahel». Selon le rapport, «l'Algérie a réussi à promouvoir le dialogue et le renforcement de l'Etat comme les meilleurs moyens pour sortir ses voisins de la crise et préserver dès lors sa propre sécurité à long terme». Pour International crisis group, il s'agit là du retour en force de l'Algérie à la politique régionale «après une longue absence». Un retour que l'ONG qualifie de «positif» à bien des égards. L'organisation cite «son approche de la promotion de l'inclusion et du compromis pour stabiliser ses voisins». Ce qui a offert, selon ICG, «une occasion à un système international qui a lutté pour faire face aux défis engendrés par les soulèvements arabes». En revenant sur le bouleversement régional, l'ONG souligne le rôle «important, parfois crucial» joué par l'Algérie dans les crises politiques et sécuritaires de trois de ses voisins, à savoir la Libye, le Mali et la Tunisie. «En Libye, elle a soutenu les négociations de l'ONU et a mené sa propre diplomatie discrète pour réconcilier les factions belligérantes. Au Mali, elle a accueilli les pourparlers tenus sous son égide entre le gouvernement et les factions rebelles du Nord, pour stabiliser le pays et pour empêcher également le sécessionnisme du Nord. En Tunisie, elle a appuyé de manière discrète, mais cruciale le consensus entre les islamistes et les laïcs qui a été la source de la stabilité de ce pays depuis 2014». L'ONG considère que l'Algérie, à travers la revitalisation de sa diplomatie à l'égard de ses voisins et du contient, menée à bien par l'actuel ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, aspire à être «le point d'ancrage d'un voisinage perturbé». Mais pour l'ICG, cela est loin d'être gagné. Car, comme le souligne le rapport, «avec des turbulences sans précédent aux frontières de l'Algérie (...) le pays doit composer avec des Etats grandement affaiblis et des menaces djihadistes. Les soulèvements arabes et la crise malienne et leurs conséquences suscitent pour la première fois en Libye, en Tunisie et au Mali, tout comme dans la vaste région du Sahel, des risques liés à la sécurité transfrontalière». ICG en veut pour preuve l'attaque de janvier 2013 contre le complexe de traitement de gaz naturel à In Amenas. En plus de l'insécurité générée par les crises chez ses voisins, l'Algérie a d'autres soucis internes. L'ONG affirme que «les ambitions algériennes ont des limites auto-imposées. Une scène politique nationale moribonde, un régime déchiré par les factions et l'incertitude quant au futur successeur de Abdelaziz Bouteflika (...) ont embrumé l'horizon politique». Toutes ces contraintes pèsent, à en croire l'ONG, sur l'aspiration algérienne à un rôle de premier plan dans la région. En conclusion, International crisis group considère que «l'Algérie a commencé, et doit continuer, à étayer ses relations diplomatiques traditionnelles en nouant des liens avec les acteurs non étatiques qui se multiplient dans la région». Selon l'ONG «l'Algérie devrait coopérer avec les Etats du Golfe, qui s'affirment de plus en plus en Afrique du Nord, et plaider sa cause par la persuasion et non en se contentant de lancer des piques». En ce qui concerne ses relations avec la France, l'ancienne puissance coloniale, et le Maroc, ICG soutient que ces relations «sont déchirées par des tensions et des rivalités souvent inutiles, otages d'une histoire que la plupart des Algériens n'ont pas vécue». Autrement dit, selon l'ONG, l'Algérien de l'après indépendance n'accorde aucune importance à son passé, son histoire et ses aïeux ! Pourtant, le présent ne peut se construire sans le passé. Mais pour International crisis «le pays s'aiderait davantage en surmontant, ou du moins en diminuant, ces tensions dans la mesure du possible. Le changement générationnel en cours de l'ensemble des dirigeants politiques et des institutions offre une occasion de le faire, à condition qu'il y ait des homologues compréhensifs. Une plus grande participation algérienne à titre d'intermédiaire pragmatique de la stabilité et des compromis politiques au Maghreb et des conflits au Sahel doit être saluée, surtout à une époque d'insécurité régionale et de polarisation idéologique accrues». Rappelons enfin qu'International crisis group (ICG) est une ONG multinationale, à but non lucratif, dont la mission est de prévenir et résoudre les conflits meurtriers grâce à une analyse de la situation sur le terrain et des recommandations indépendantes. ICG a été créée en 1995 comme organisation non-gouvernementale internationale sur l'initiative d'un groupe de personnalités transatlantiques désespérées par l'incapacité de la communauté internationale à anticiper et répondre efficacement aux tragédies dans le monde. H. Y.