Une belle ville se distingue toujours par la place réservée à l'art et à la création dans ses espaces internes et externes. En plus de l'animation permanente des espaces et des établissements culturels, chaque carré du paysage citadin doit briller de mille feux. L'embellissement des façades d'immeubles et d'institutions, la décoration des devantures de magasins et l'ornementation des autres lieux publics (gare, aéroport, station de métro, placette, carrefour, jardin, petit recoin...) participent à la confection de cette image d'une cité où l'on se plaît bien. Dans de nombreux pays à forte vocation touristique (France, Allemagne, Brésil, Cuba...), des artistes sont régulièrement invités pour réaliser des fresques murales, exécuter des sculptures diverses ou participer à des montages qui donnent des couleurs et des nuances à l'espace urbain. Cette esthétique, sans cesse renouvelée au fil des innovations techniques et des tendances artistiques, suscite l'intérêt et l'admiration des résidents et des visiteurs. L'idéal, en effet, consiste à mettre l'art dans la rue, le cœur battant de la société réelle. Dans des métropoles comme Rio, Berlin, La Havane ou Paris, on en a plein les yeux partout. Le touriste atterrit dans un monde féerique où il ne se lasse pas de faire des découvertes de toutes sortes. Les habitants aussi vivent au rythme de cet incessant mouvement artistique où des créateurs locaux et étrangers ne tarissent pas d'imagination pour les surprendre presque chaque matin. D'un quartier à l'autre, on éprouve un sentiment de dépaysement au gré des changements de tons, de formes et de recettes d'un art urbain prolifique et plein d'originalité. Ceci dit, des initiatives similaires manquent tellement aux villes algériennes. L'aspect et l'ambiance de nos cités sont franchement stressants. Les autorités locales ne se soucient nullement de l'art, pour ne pas dire plus. Nos artistes, eux-mêmes, ne sont également pas organisés pour agir avec efficacité et proposer des idées et des projets dignes de ce nom. Par ailleurs, les artistes de rue constituent une corporation à eux-seuls. On trouve dans chaque ville des associations, des fédérations et des collectifs spécialisés dans les arts urbains, agissant en interlocuteur ou en partenaire vis-à-vis des pouvoirs publics. Les créateurs algériens doivent absolument s'en inspirer pour s'unir et constituer une force de proposition afin d'agir et changer les mentalités. Récemment, on a vu, un peu partout à travers le territoire national, des groupes de jeunes volontaires qui se chargaient de nettoyer, de repeindre et de colorer des coins de rues, des escaliers publics ou des passerelles. De belles photos et des vidéos, postées sur Internet, ont fait des émules dans les petites localités et même dans les villages. Il s'agit d'une louable initiative qu'il va falloir amplifier et élargir encore pour gagner la sympathie des citoyens et, au final, «forcer l'intérêt» des assemblées locales. C'est comme cela que l'artiste réussira à s'imposer sans se rabaisser devant quiconque. Le programme «Blanche Algérie», consacré au nettoiement et à l'embellissement des espaces publics, peut servir cette cause de l'art de rue. Beaucoup d'argent est annuellement alloué à cette entreprise, mais les résultats sont à peine «visibles» car on n'y a pas associé l'art. Il appartient aux artistes, et à eux seuls, de mûrir des idées, de proposer des projets concrets dans ce sens et de montrer de quoi ils sont capables. Les citoyens, comme partout, sont avides de nouveauté et de beauté. Et, c'est l'essentiel. Le maire, le chef de daïra, le wali ou le directeur de la culture ne peuvent pas ignorer indéfiniment cette légitime aspiration de leurs administrés. K. A.