Les douze danseurs russes et à leur tête le chorégraphe Rustam Nadyrshin, de la troupe Saint-Pétersbourg dance theater «Temptation» ont enflammé les planches du Théâtre national algérien a l'occasion de la deuxième soirée du 7e Festival culturel international de danse contemporaine d'Alger. Cette deuxième soirée a également été marquée par les performances des troupes espagnole, tunisienne et algérienne. Le show des Russes a débuté avec un tableau énergique : huit danseurs vêtus de costumes noirs prennent possession de la scène, sur une musique électro et hip hop. Dès les premiers mouvements, les danseurs ont d'emblé conquis les présents par les nombreuses figures effectuées avec des gestes vifs et saccadés sous rythmés par les applaudissements du public. Puis les présents ont été conviés à un enchainement d'une série de tableaux qui racontent l'histoire de l'évolution de l'être depuis les premiers émois amoureux juvéniles jusqu'à l'ultime rencontre d'une vie en passant par la première déception d'entrée dans la vie d'adulte happée par le quotidien et le poids du patronat. Des tranches de vie, où se dévoile toute la maîtrise des danseurs tant au plans technique et de la synchronisation, avec une expression corporelle soutenue par des muscles fins saillant mis au service de la théâtralité des différentes situations dramaturgiques tel un outil scénique à part entière. Dans certain tableaux, il y a également eu un clin d'œil à la danse classique dont est issue la majorité des danseurs de la troupe «temptataion» avec une séquence poétique, mais aussi un danseur vêtu de collants qui s'incruste dans certains tableaux avec des mouvements d'une haute technicité tel un rappel des racines de la danse contemporaine. Les danseurs venus de Saint Petersburg ont également offert au public deux danses folkloriques russe très acrobatiques, dans une ambiance joviale et jubilatoire. Lors de ce tableau le public riait aux éclats aux farces des danseurs, une véritable interactivité avec les présents lors de la séquence de la «battle» avec des applaudissements entres les deux parties d'un public complètent tombé sous le charme de ces artistes complet véritables Shows man. Le chorégraphe russe a conquis le cœur du public avec cette déclaration d'amour de la passion de la danse, mais également en illustrant sur scène une palette de sentiments que chaque individu éprouve dans la vie. Une mise en scène chorégraphique appréciée par le public qui n'a pas cessé d'applaudir les performances techniques lors des tableaux énergiques, mais également était dans un recueillement religieux lors des tableaux poignant sur un fond de musique mélancolique où l'émotion imprégnait les présents au plus profond de leur être. La troupe Temptation a ainsi offert un spectacle époustouflant où l'énergie enthousiaste des danseurs était au diapason avec celle du public qui a offert à ces artistes un standing ovations, qui a duré plus d'une dizaine de minutes durant lesquelles il scandait «Spasiva» (merci en russe). Dans les coulisses, le chorégraphe Rustam Nadyrshin, confie les yeux pétillants de mille étincelles : «Le public algérien est merveilleux, il nous a transmis une grande énergie et c'était un honneur, un bonheur et une joie d'être en Algérie.» Il a précisé à propos du spectacle : «Nous avons présenté ce soir le large éventail de nos différentes créations. Les danseurs de la troupe pratiquent la danse dans ses différents styles. En Russie, c'est vrai que la danse classique est la plus pratiquée. Mais aujourd'hui, il y a un réel engouement pour la danse contemporaine, cela ne se limite pas seulement aux professionnels ou aux gens du métier, mais également au grand public.» Le duo espagnol Iker Arrue et Caremen Fumero de la compagnie «Ai Do Projet» ont, quant à eux, présenté le spectacle intitulé «Derrière la nuque». Avec une grande poésie, la pièce aborde la réaction des individus face à des situations difficiles marquées par le manque et la carence. Comment préserver ses valeurs lorsque l'essence même de celles-ci sont foulées aux pieds ? Cette question existentielle a été exprimée sur scène par un jeu intimiste mêlant délicatesse, sensualité et intériorité. Les deux danseurs espagnols ont évolué dans des géométries véritables selon les situations dévoilant une technicité harmonieuse où le corps se libère pour dévoiler son âme. La Tunisie a également surpris le public qui était présent au TNA par un spectacle intitulé Rond-point, où le chorégraphe a choisi de miser sur l'expression corporelle, sans musique pendant les trois quarts du spectacle afin de mettre en relief la dramaturgie de cette pièce chorégraphique qui interpellent les présents par son approche esthétique. Les cinq danseurs tunisiens évoluent sur scène dans des gestes précis pour incarner les différents personnages interprétés, en l'occurrence un contrôleur, un musicien, une femme enceinte, une femme schizophrène, et une femme non-voyante. A la fin du spectacle, le chorégraphe tunisien, Marwen Errouine, souligne que «Rond-point aborde le parcours de ces cinq personnages. Il s'agit de cinq comportements et caractères différents. C'est une histoire issue de mon imaginaire pour raconter la Tunisie d'aujourd'hui». L'Algérie était également représentée lors de cette deuxième soirée du festival avec Samar Bendaoud danseuse vedette de la coopérative culturelle et artistique Nouara. La danseuse algérienne a fait preuve d'une grande technicité émotionnelle en incarnant sur scène l'histoire d'une femme qui se retrouve du jour au lendemain dans la rue, rejetée par sa famille et son bien-aimé. La passion, la déception, le désir étaient incarnés sur scène dans des mouvements en harmonie avec les notes langoureuses du luth et de la flute orientale, puis plus saccadé sur les rythmes des percussions africaines dans un tempo crescendo, Samar Bendaoud enchaîne les figures faisant preuve d'une grande expérience dans la maîtrise de l'expression des émotions à travers le langage du corps, une performance talentueuse qui a également été également fortement applaudie par les présents. La chorégraphe Nouara Idami, directrice de la coopérative «Nouara» confie que «ce spectacle est en vérité un extrait d'un projet du spectacle que l'on n'a pas eu l'occasion de produire faute de moyens. Dans mes créations, la femme est au cœur de la thématique, il s'agit de la place de la femme dans la société, mais également ses tourments, ses bonheurs et sa vie intérieure». S. B.