Photo : Sahel De notre envoyé spécial à Adrar Abderrahmane Semmar Le bilan des dégâts occasionnés par les dernières intempéries dans la wilaya d'Adrar (sud-ouest du pays) s'alourdit de jour en jour à Aoulef. De nombreuses maisons menacées de ruine s'effondrent quotidiennement dans cette localité sinistrée distante de 250 km au sud du chef-lieu de wilaya, Adrar. Considérée comme étant la plus affectée des 7 autres communes sinistrées de la wilaya, Aoulef désormais assiste impuissante au décompte macabre de ces demeures dont les mûrs lâchent complètement prises sous l'effet de l'eau et de la décantation du sable sur les toits. En effet, partiellement touchés par les dernières pluies récurrentes, les murs fissurés de ces innombrables maisons construites en toub (briques en pisé, ndlr) se dilatent après le séchage. Rongés par l'eau, ces murs s'effondrent dès lors comme des châteaux de cartes. Ce constat dressé par les services du contrôle technique des constructions (CTC) d'Adrar et de la direction de l'urbanisme et de la construction de la wilaya, confirme les appréhensions exprimées par les pouvoirs publics au sujet des vieilles maisons en toub. Si la prise en charge des sinistrés d'Aoulef est «totale et globale», selon le secrétaire général de la wilaya, Abdelkader Baradei, il n'en demeure pas moins que le danger persiste dans cette localité. Et il persistera aussi longtemps que ces vieilles maisons en toub continueront de servir de demeure pour la population locale. Pour preuve, en feuilletant le dernier bilan de la wilaya, on a relevé que durant ces trois derniers jours au moins 57 maisons sont tombées en ruine. Et un grand nombre des 1 804 constructions partiellement touchées risque de connaître ce même sort dans les jours à venir. C'est ce qui explique, sans nul doute, qu'à Aoulef, les autorités locales, notamment les équipes de la Protection civile soient toujours sur le qui-vive. Cependant, il faut signaler qu'Aoulef est loin d'être une simple ombre au tableau. Car la wilaya d'Adrar est bel et bien consciente que l'habitat précaire qui abrite les deux tiers de la population de la wilaya incarne un véritable danger de mort. Selon les successives expertises réalisées par l'ensemble des services de l'urbanisme de la région, les 249 ksars, constitués entièrement de maisons en toub, que compte la wilaya d'Adrar sur son territoire exposent leurs habitants à de très grands risques en cas de fortes pluies. De simples rafales de vent peuvent s'avérer fatales pour les habitants de ces ksour. Il y a donc péril en la demeure. En tout et pour tout, 30 000 habitations précaires sont recensées dans toute la wilaya. «Toutes ces constructions ne sont pas normalisées. Avec le changement climatique qui est une réalité incontestable, que l'on vit aujourd'hui au quotidien, la population doit revoir son mode d'habitat. Les maisons en toub ne peuvent en aucun cas résister à la nouvelle pluviométrie de la région. C'est pour cela que nous allons bannir ces constructions», nous explique-t-on au niveau de la direction de l'urbanisme et de la construction de la wilaya d'Adrar. Le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, Nourredine Moussa, lors de sa dernière visite à Aoulef, juste après les intempéries, a instruit lui-même les services relevant de son secteur d'interdir tout octroi du permis de construire pour ce type de maison. Des programmes ont été établis pour relancer l'habitat rural et le logement social dans la wilaya. Des aides pour la réhabilitation des maisons en toub ont été également débloquées. Une large place au logement a été accordée aussi dans les programmes communaux de développement (PCD). Mais les résultats peinent à voir le jour. «On ne peut opérer un changement de grande envergure en si peu de temps. Les restaurations accomplies dans beaucoup de ksour ont permis à leurs habitants de se protéger contre les dernières intempéries. Il nous faudra certainement beaucoup de temps pour venir à bout de ce problème», relève de son côté Abdelkader Baradei. En attendant, enfin, la dynamique plus que nécessaire pour ne pas dire salutaire, les caprices de la météo risquent encore une fois de prendre une tournure dramatique dans la wilaya d'Adrar. Et la tragédie d'Aoulef ne serait alors qu'une vaine leçon...