De notre correspondant à Constantine A. Lemili Rachid Sidi Boumediene, directeur de recherche associé au Cread et enseignant à l'université d'Alger, a souligné dans la synthèse des travaux d'atelier, que les experts étaient tous d'avis que «la modernisation de Constantine devra être conçue et menée dans le respect de l'identité de la ville, de sa personnalité historique» et «dans le souci de sauvegarde et de valorisation du patrimoine matériel et immatériel de cette cité millénaire». Les experts, réunis au cours de ce workshop organisé par la wilaya de Constantine, ont, par ailleurs, recommandé le lancement d'une «réflexion sur une politique touristique» du fait qu'ils se sont dit «grandement impressionnés» par le site naturel du Rume1. Ce sont, là, les propos les plus sérieux qui auraient eu plus de mérite d'être mis en exergue par nos confrères lors du workshop international relatif à la modernisation des villes d'Algérie à partir de l'expérience constantinoise.C'est vrai que les officiels locaux sont subjugués par le clinquant ; un jeune dans son langage désabusé aurait dit certainement «bling-bling» des pays du Golfe et plus particulièrement des miracles réalisés à Dubai et ont entraîné nos confrères dans une certaine forme de délire collectif. Constantine, qui vit dans cette euphorie du moderne et tout autant gigantesque, en a par conséquent oublié ce qui en a fait l'essentiel, son histoire et le nombril de son histoire, ce qui fait aussi sa constitution géographique, en l'occurrence les nombreuses cités judicieusement agglomérées et appelées «Vieille ville». Or, chaque jour, une maison, une histoire et l'âme de cette maison s'en vont avec. Il suffit pour cela de lire les comptes rendus quotidiens d'intervention de la Protection civile évacuant des rescapés pour mesurer l'ampleur du drame. Et comble du paradoxe, d'un côté la vieille ville est réhabilitée au titre de son statut de patrimoine historique national et d'un autre elle s'en va à vau-l'eau. Pis encore, sa destruction et surtout la destruction délibérée de vestiges historiques remontant à toutes les civilisations (même coloniales) qui ont transité, occupé ou défendu Cirta est quasi régulière pour des raisons parfois frisant l'absurde telles que la lutte contre le banditisme. Et nous en prenons pour triste exemple le fameux pont romain situé à la périphérie de celui d'El Kantara, dont les voies d'accès ont été sciemment vandalisés pour en interdire l'usage à des petites frappes de la délinquance (dealers, homosexuels, etc…). Quoiqu'en d'autres circonstances, nettement moins belliqueuses, c'est par recours au bulldozer que des pâtés de maison datant de la période turque ont été mis au sol face à l'émoi de leurs propriétaires, même si ces derniers ont également tellement de reproches à se faire compte tenu de la négligence ayant conduit à une telle situation, et à une population constantinoise scandalisée. Une mise à mort qui ne sera stoppée que grâce au tapage médiatique unanime de la presse nationale et pour qu'enfin le ministère daigne prendre en charge le dossier et assurer le relais. Est-il alors nécessaire de poser des questions autour de l'engagement du wali de Constantine de restaurer le chemin touristique, le site dit Remesse, les bains romains, etc. ? Dans la mythologie grecque, Héraclès a vite fait de nettoyer les écuries d'Augias, la restauration du palais du bey dans la ville des Ponts est près d'être vécue par deux générations. Que dire alors de la restauration de la vieille ville et des sites naturels et riches du Rhumel ? Quant à la modernisation de la ville, c'est une autre histoire qui va certainement rejoindre le fameux SCUC, sinon le schéma de cohérence urbaine de Constantine qu'un ministre, en l'occurrence Abderrachid Boukerzaza est venu vanter dans la ville d'Ibn Badis comme il l'avait fait pour le SCUO (Oran). Toute la panoplie étant depuis remisée en attendant de… Pour l'anecdote, voilà ce qu'en pense sur son blog un Français qui a pris l'habitude de venir chaque année en Algérie : «Cela dit, je pense que les Français ne doivent plus craindre de se rendre en Algérie, y compris pour y passer des vacances. Mais je pense aussi que l'Algérie doit, tout en veillant à ne pas laisser trop ‘'bétonne'' des sites naturellement propices au tourisme, faire beaucoup d'efforts pour développer celui-ci.»