Photo : Riad Par Noureddine Khelassi Le zaïmisme, fruste version algérienne de démiurge ou de l'homme et de la femme providentiels, fut consubstantiel au mouvement nationaliste. Et même si le point de départ de l'aspiration indépendantiste fut la panmaghrébine Etoile nord-africaine, le providentialisme politique aura au début le visage hiératique de Messali Hadj. Et, dans chaque branche du nationalisme, il aura les traits du chef, «ombre de Dieu» sur Terre. Nationaliste, oulémiste ou libéral, le zaïm était le père-patron. Le zaïmisme, c'est finalement une philosophie de base. Une culture acquise, une tradition politique. Elle imprègne si bien les esprits qu'elle fait toujours fi de la mondialisation des idées. Qu'il se réclame de la légitimité historique, de la revendication démocratique ou de l'islamisme pragmatique ou négateur du projet démocratique, le leader politique est, envers et contre tous, un zaïm. Le zaïmisme n'est pas un produit ex nihilo. Il est lié aux conditions historiques de l'évolution du nationalisme. Il est aussi le résultat d'une culture ancestrale privilégiant le rapport de force pour résoudre les conflits et le recours à une figure tutélaire pour l'arbitrage. C'est la figure du chef de tribu, de l'imam et du saint, ces trois pouvant en période de conflit, se transformer en chef de guerre. C'est, en fait, la figure du père, du premier d'entre ses pairs et du détenteur du pouvoir fondé sur la force. La soumission au père, au saint patron, est ainsi transposée, avec des nuances, dans les organisations politiques. Et l'on retrouve ce schéma dans les partis d'opposition comme de pouvoir, après 1962. De l'UDRS, au FFS, en passant par le CNDR, le PRS, l'ORP, l'OCRA, le MDRA, le RUR, et, plus tard, le GDSA, le CTA, le GCR, l'OST, El Oumami, le MDA, et les partis issus du multipartisme après 1989, obéiront, à des différences près, au chef et, in fine, au zaïm. La relation des formations politiques, toutes tailles et toutes obédiences confondues, est alors marquée par un superbe paradoxe. Face à ces rivaux d'aujourd'hui, le FLN, ancien parti unique et matrice du nationalisme, fait figure d'organisation «démocratique». Dans le sens où c'est la seule formation à assurer un turn over à sa tête. Ainsi, depuis 1962, il a organisé 8 congrès ordinaires et mis à sa tête 9 fondés de pouvoir. En comparaison, les opposants, notamment les autoproclamés démocrates, ont toujours à leur sommet des chefs inamovibles que les congrès reconduisent comme si leur légitimité politique était de droit divin. Hocine Aït Ahmed est président du FFS depuis 1963. Saïd Sadi l'est depuis la création du RCD en 1989. Louisa Hanoune depuis 1990. Des particules comme AHD 54 n'échappent pas à la règle. Les islamistes aussi. Au MSP, c'est la biologie qui a permis l'avènement d'Abou Djorra Soltani. En fait, la seul alternance démocratique digne de ce nom, on la retrouve à la tête de la… FAF.