La ministre de l'Education nationale, Mme Nouria Benghabrit, ne démissionnera pas. Elle ne sera également pas démise de ses fonctions. Malgré les harcèlements et les multiples critiques de ses détracteurs, qui seraient peut-être même derrière la fuite au Bac à en croire les réseaux sociaux, Mme Benghabrit continue son combat. Une façon propre à elle de dire «je ne me laisserai pas faire». Et elle a raison. Car il faut se dire des vérités, il ne s'agit nullement de la première fuite de sujets au baccalauréat en Algérie. Cela n'exclue nullement le fait qu'une fuite de sujets à l'examen du baccalauréat est une chose très grave qui remet en cause la fiabilité des diplômes algériens et dont la responsabilité relève de la ministre. Mais -car il y a un mais- cela pousse à se poser des questions sur l'étonnante rapidité avec laquelle s'est produit une levée de boucliers pour le départ de Mme Benghabrit. Les islamo-conservateurs n'ont pas attendu - pour ne pas dire ils ont accouru- pour faire signer une pétition aux députés exigeant le départ de la ministre de l'Education. Cette dernière sera cependant soutenue non seulement par les syndicats et les parents d'élèves mais aussi par le Premier ministre Abdelmalek Sellal et le patron du RND, également chef du cabinet du président de la République, Ahmed Ouyahia. Un soutien dont avait grandement besoin la ministre qui n'est pas à sa première attaque. En fait, Mme Benghabrit, cette sociologue de 63 ans, subit des attaques depuis sa nomination, et même avant son installation, il lui a été reproché sa supposée origine «juive». La ministre est également attaquée depuis qu'elle a évoqué l'idée d'introduire l'arabe dialectal dans un enseignement jusqu'à présent dispensé uniquement en arabe classique. Elle est accusée d'appliquer un «programme de destruction de l'école algérienne, imposé par la France», comme aime à le répéter, l'un de ceux qui demandent son départ à savoir Abderrezak Mokri, le chef du MSP. Ainsi donc, Mme Benghabrit, une femme sans aucune appartenance partisane, mais avec une stratégie et une conviction, avance sur un chemin miné où à couteaux déployés et aiguisés, les islamo-conservateurs guettent son moindre faux pas. La fuite des sujets au baccalauréat a été ce faux pas tant attendu. Pourtant Mme Benghabrit a été irréprochable dans sa gestion, enregistrant succès après succès. Elle a réussi à contenir les mouvements de protestation qui défrayaient la chronique dans son secteur en signant des accords avec les syndicats du secteur. Elle a aussi réussi à gérer sagement le grave dossier des enseignants contractuels. Pourquoi cherche-t-on donc tant à faire partir la ministre malgré des résultats probants à la tête de l'Education ? La réponse est simple, Mme Benghabrit, et dès son installation à la tête du ministère de l'Education nationale, a affiché sa volonté de revoir le contenu des programmes scolaires. Elle a parlé de «modernisation» de l'école ce qui n'a pas été du goût de certains islamo-conservateurs. Accusée d'incarner «une menace réelle pour les valeurs du pays», Benghabrit devient alors la femme à abattre. Malgré cela, la ministre, toujours méthodique, pertinente et inflexible sur ses positions, semble décider à mener à bien la mission qui lui a été confiée à la tête du secteur de l'éducation. H. Y.