Les discours xénophobes de Nicolas Sarkozy (Les Républicains) et de Marine le Pen (FN) font des émules à Paris. Même le PS, traditionnellement plus modéré, se lâche dans la fange répugnante du chauvinisme, avec la vaine ambition de remonter dans les sondages. La crise économique, qui étouffe le modèle européen depuis 2008, fait perdre les pédales à l'élite politique française qui met bêtement ses propres échecs sur le dos de l'émigration et des citoyens d'origine africaine. C'est une tare typique de l'Hexagone qui consiste à masquer sa faiblesse, en désignant des boucs émissaires à la vindicte populiste. Pour ces politiciens en mal de publicité, si la France peine à aller de l'avant, c'est à cause des émigrés ! Ces mêmes émigrés qui construisent et défendent la France depuis des siècles ! L'Assemblée nationale française, comme pour enfoncer davantage le clou, vient de retirer un projet de loi conçu pour la lutte contre «les contrôles au faciès». Le texte en question, promesse électorale du président François Hollande lors de sa campagne de 2012, prévoit la délivrance systématique d'un récépissé de contrôle d'identité par les forces de l'ordre pour protéger, un tant soit peu, les citoyens de couleur contre l'acharnement policier. «Ces contrôles d'identité visent aujourd'hui majoritairement - et de façon quotidienne et répétée- les Français de peau noire ou basanée», souligne le député socialiste, Pouria Amirshahi. Le parlementaire révèle dans sa plaidoirie une statistique officielle de 14 millions de contrôles par an, durement ressentis par les citoyens originaires d'Afrique noire et du Maghreb. C'est très simple, aux yeux de la police tricolore, les noirs et les bruns sont tous suspects jusqu'à preuve du contraire. Ce discours fasciste, naguère propre à l'extrême droite, fait aujourd'hui l'unanimité en France. Des politiques de gauche et de droite, de pseudos intellectuels parisiens et des commentateurs télé s'engouffrent aussi dans la brèche pour médire et maudire l'étranger et le naturalisé, ces éternels intrus. Dans les autres pays d'Europe, y compris les pays de l'Est fraîchement convertis à la «démocratie», on a rarement vu un tel ralliement discriminatoire. En Allemagne, en Angleterre, en Italie et partout ailleurs, en dépit de la crise, les élites se montrent beaucoup plus tolérantes et respectueuses des droits fondamentaux de la personne humaine. La France, en cela, fait une triste exception. Cette approche irraisonnée va, toutefois, à l'encontre de ses intérêts et de son image dans le concert des nations. Les étrangers sont de moins en moins nombreux à vouloir se rendre ou visiter le pays. Même les réfugiés de guerre (Syriens, Afghans et Libyens) lui préfèrent de loin des pays comme l'Autriche, la Suisse, l'Allemagne, le Canada, les Etats-Unis, l'Australie et les pays scandinaves. Les réactions excédées de stars françaises comme Karim Benzéma, Eric Cantona, Gérard de Pardieu et Dieudonné, entre autres, sont senties comme des attaques au lieu d'être perçues comme des mises en garde contre une dérive politicienne dangereuse et incontrôlée. Au stade de France, lors de la finale de l'Euro-2016 qui a opposée le pays organisateur au Portugal, la moitié des spectateurs (en majorité français d'adoption) ont encouragé les camarades de Christiano Ronaldo avant de fêter abondamment leur sacre dans les rues de Paris. Une attitude de défi, traduisant un ras-le-bol du discours ambiant des politiciens français qui incarne, à lui seul, la décadence de la France. K. A.