Le palais de la culture Moufdi Zakaria abrite, depuis hier matin, un colloque international dédié à l'artiste algérien Omar Racim, personnage emblématique de la scène culturelle et politique algérienne, dont les traces ont presque disparu, à l'exception de quelques-unes, soigneusement conservées par ses disciples, ainsi que des anecdotes se rattachant au personnage transmises de génération en génération. Ce colloque de deux jours, organisé par le ministère de la Culture, en collaboration avec le laboratoire des constructions modernes d'Alger, a été inauguré par M. Mihoubi, le représentant de la ministre de la Culture, Khalida Toumi, qui a, dans son discours, tenu à souligner la place qu'occupait Omar Racim dans la société algérienne, aussi bien en tant qu'artiste aux multiples talents qu'en homme politique avisé. Le représentant du laboratoire des constructions modernes, Mohamed Laaredj, dira, pour sa part, que «Omar Racim a joué un rôle artistique et politique très important dans le mouvement nationaliste et cela grâce à ses méthodes de résistance qui se résument à l'art et à la plume. Il a su faire de son art et de ses articles de presse des outils pour affaiblir les projets du colonialisme. Aussi, Racim a longtemps tenté, inlassablement, d'éveiller la jeunesse algérienne et de lui inculquer l'importance des emblèmes de sa culture». Parmi les présents à cette rencontre se trouvait Ali Ali Khodja, artiste peintre algérien de renommée et neveu d'Omar Racim. «S'agissant des frères Racim, je dirai que le style d'Omar est plus maghrébin que celui de son frère Mohamed, mais, hélas, Omar Racim fait partie de ces gens dont on parle très peu. Je l'ai connu très jeune et je n'ai jamais osé lui poser de questions, celles qui me brûlent les lèvres aujourd'hui. Il m'impressionnait, tout court ! Mais heureusement que j'ai su garder quelques documents. Mon oncle Omar est une personne qui vivait en retrait, chose qui a empiré avec sa maladie. Après sa mort rien n'a été fait. C'est vraiment désolant, même les gens qui l'ont côtoyé ont disparu», dira l'artiste. Aux côtés de M. Khodja, Ahmed Serri, professeur de musique et disciple du grand Abderrezak Fekhardji dira : «Je me rappelle vaguement ce grand homme. Il venait régulièrement assister à nos concerts à l'association El Djazairia. C'était un homme qui aimait son pays. Il adorait tout ce qui nous appartient, c'était un Algérien à 100%. Avec des positions bien précises, il concrétisait tous ses propos. Il a d'ailleurs été condamné à mort lors de la défaite des Français face aux Allemands lors de la Première Guerre mondiale. Il avait été accusé de collusion avec les Allemands, une accusation jamais prouvée. Malheureusement, peu de gens connaissent son parcours. Nous vivons dans un pays qui ne reconnaît pas le mérite de ceux qui ont fait son Histoire», affirme le musicien, l'air dépité. «Saviez-vous que Omar Racim avait des enregistrements à la radio ? Il avait une voix magnifique, et ses lectures du Coran sont incomparables. Dommage, tout a disparu des archives», ajoutera-t-il avec tristesse. En outre, diverses communications on été données par des universitaires qui se sont penchés sur la vie de Omar Racim. On citera l'intervention de Faïza Mhentazi, professeur à l'université de Tlemcen, qui évoquera le parcours journalistique d'Omar Racim, citant son passage au journal El Hak d'Oran et Dou el fekar, ainsi que sa revue. «Cette revue a incarné un saut de qualité pour la presse algérienne. Il rédigeait ses articles d'une plume imprégnée de douleur et dans le souci d'encourager les jeunes à s'accrocher à leurs valeurs algériennes», dira l'universitaire, qui ajoutera que Omar Racim «était un homme assoiffé de liberté qui n'hésitait pas à faire circuler ses idées libérales et religieuses». «C'est un personnage qui a vécu et mourut dans le silence», conclut-elle.Le colloque consacré à Omar Racim sera clôturé aujourd'hui et aura réussi à ressusciter la mémoire de l'une des figures emblématiques de la culture algérienne. Notons qu'une exposition de ses œuvres est organisée au Musée des antiquités algériennes. W. S.