Juan Manuel Santos a rencontré, hier, à huis clos et séparément, ses prédécesseurs Alvaro Uribe et Andres Pastrana, qui ont mené une intense campagne pour le «non» à l'accord avec les Farc Le président colombien Juan Manuel Santos a limité le cessez-le-feu avec les Farc au 31 octobre et devait, dans l'espoir de trouver une nouvelle solution avec la rébellion marxiste, rencontrer, hier, son prédécesseur Alvaro Uribe, farouche opposant au dernier accord de paix. «J'espère que nous pourrons avancer (...) pour concrétiser les dispositions et les accords qui nous permettent de mettre en œuvre la solution à ce conflit», a déclaré tard mardi dernier M. Santos dans une déclaration télévisée, après avoir limité le cessez-le-feu au 31 octobre. Après le rejet par un référendum dimanche de l'accord de paix avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), le chef de l'Etat s'est dit prêt à de nouveaux pourparlers avec la guérilla «afin d'aboutir à un accord et au rêve de toute la Colombie d'en finir avec la guerre». Un cessez-le-feu bilatéral, et à l'origine définitif, avait été décrété le 25 août, au lendemain de la conclusion des négociations menées depuis près de quatre ans avec la principale guérilla du pays, et délocalisées à La Havane. Ce cessez-le-feu était entré en vigueur le 29 août et aucun incident n'a été enregistré depuis. L'accord solennellement signé par M. Santos et par le commandant en chef des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), Timoleon Jimenez «Timochenko» le 26 septembre à Carthagène des Indes (nord), a cependant été désapprouvé par 50,21% des Colombiens lors d'un référendum dimanche. Cette consultation populaire, non obligatoire pour l'entrée en vigueur de ce texte de 297 pages, avait été voulue par le président Santos afin de donner «une plus large légitimité» à la paix. Mais malgré le revers du scrutin, marqué par une forte abstention de 62%, les deux parties ont confirmé leur intention d'observer le cessez-le-feu. Se disant prêt à «rectifier» l'accord de paix rejeté, Timoleon Jiménez a assuré lundi que la guérilla resterait «fidèle à ce qui a été accordé» et maintiendrait «le cessez-le-feu bilatéral et définitif afin de soulager les victimes du conflit et respecter l'accord avec le gouvernement». Ce dernier a appelé mardi sur Twitter «le peuple colombien à se mobiliser pour soutenir résolument l'Accord final». Hier, des «marches citoyennes» ont été convoquées dans 12 villes à travers le pays ainsi qu'à New York et Paris. M. Santos a rencontré, hier, à huis clos et séparément, ses prédécesseurs Alvaro Uribe et Andres Pastrana, qui ont mené une intense campagne pour le «non» à l'accord avec les Farc. Ces réunions visent, a tweeté le chef de l'Etat, «à dialoguer avec un esprit constructif en faveur de la paix». M. Uribe, actuel sénateur et patron du Centre démocratique, s'était déclaré disposé à exposer les raisons de son opposition à M. Santos, qui a été son ministre de la Défense au moment de la lutte la plus intense contre les Farc, et qu'il considère aujourd'hui comme un «traître» pour avoir négocié avec la guérilla. Les deux hommes ne se sont pas vus publiquement depuis le 10 janvier 2011. Au fil des décennies, ce conflit complexe a impliqué les Farc, issues en 1964 d'une insurrection paysanne, mais aussi d'autres guérillas d'extrême gauche, des milices paramilitaires d'extrême droite et les forces armées. Cette guerre fratricide, dont les régions isolées et pauvres portent encore les stigmates, a fait plus de 260 000 morts, 45 000 disparus et 6,9 millions de déplacés par la violence. Le président Santos, qui a plusieurs fois invité M. Uribe à parler des négociations de paix, avait dit ne pas comprendre pourquoi ses prédécesseurs, de surcroît jusque-là adversaires en politique, s'étaient unis pour s'opposer à l'accord avec les Farc. Alvaro Uribe était allé jusqu'à appeler à la «résistance civile» contre les pourparlers de La Havane et a participé à une chaîne humaine contre l'accord le jour même de sa signature. Selon lui, les guérilleros démobilisés ne devraient pas participer à la vie politique mais aller tous en prison au lieu de bénéficier de peines alternatives comme le prévoyait l'accord de paix pour ceux ayant reconnu leurs crimes. Reuters