L'installation Invasion incarne l'esprit du collectif où le concept de l'esthétisme visuel est transgressé par un objet ludique pour transmettre un message spirituel La 4e édition des expositions Al-Tiba9, organisée par le collectif Asswad autour de la thématique de «La transgression» jusqu'au 31 novembre prochain, au musée du Bardo, convie les visiteurs à découvrir les œuvres originales de douze artistes algériens et étrangers autour de cette thématique. Dans le texte de Mazia Djab, du collectif Asswad, qui présente une œuvre composée de tableaux de calligraphie et de photos d'un jeune, intitulée Les noms d'Allah, il est souligné qu'«aborder une réflexion sur la transgression reste encore aujourd'hui toujours difficile, car celle-ci est souvent perçue négativement, comme une destruction. Pourtant il serait plus juste de dire qu'enfreindre l'interdit est une déconstruction mais surtout une réappropriation d'un réel qui parait obsolète pour une reconstruction». Dès lors «la transgression est au cœur de n'importe quel acte instaurant une tradition ou une coutume. C'est pourquoi il faut saisir cette expression d'une imagination créatrice à l'œuvre». Pour sa part, avec son œuvre intitulé You, l'artiste catalan Albert Coma Bau, explore la dimension spirituelle du cycle de la vie dans son côté le plus sombre et le plus lumineux. Il s'agit de transgresser les lois de la physique, de notre éphémère existence, de la vie et de la mort pour des interrogations existentielles. Albert Coma Bau confie que «c'est à la suite du décès d'un parent très proche, il ya deux années, que j'ai traversé une période sombre pétrie d'une profonde tristesse marquée sur le sens de la vie et de l'existence». Il explique que, telle une catharsis, cette œuvre, dont la création est aussi basée sur les matériaux utilisés et le cercle noir, a été peinte a partir de pigments obtenus après avoir transformé en charbon un morceau de bois mort qu'il a dilué dans de l'eau. Ainsi, on retrouve les différents éléments du cosmos, la terre dont l'arbre est le fruit, le feu qui engendre le charbon, l'eau, symbole de la vie qui redonne vie au bois mort, le tout contribue à la naissance d'une œuvre. Le halo de lumière à travers la lampe symbolise l'air, et cette énergie canalise pour éclairer les plus sombres des nuits, dont celle des âmes perdues dans leurs douleurs. L'installation est accompagnée d'un texte : «Vous m'avez ouvert un rayon de lumière à travers un rideau, il y avait quelque chose de sacré dans tout cela. Maintenant, je sens que, si je tourne, l'univers engloutit la chambre.» Artiste perfectionniste, Albert Coma Bau a subtilement laissé quelques traces sombres déborder du cercle comme un signe pour dire que la perfection n'est qu'une illusion de l'esprit. Le contraste est saisissant. Quant à l'italienne Jiuliana Bellini, son installation originale, intitulée Invasion, incarne l'esprit du collectif où le concept de l'esthétisme visuel est transgressé par un objet ludique pour transmettre un message spirituel. Invasion occupe la majorité du sol. Il est expliqué que «l'artiste imagine une forme de vie qui s'installe et se multiplie en envahissant le lieu lui-même, les ballons collés au sol éclatent occasionnellement dans un vacarme joyeux, ou, parfois, se décollent vers d'autres espaces. Ce qui arrive est devenu une véritable invasion, où la présence des ballons envahit le musée du Bardo». Quant à l'œuvre de Mounir Fatmi du Maroc, un artiste coté dans les plus grandes galeries et musées internationaux, elle est intitulée Tête Dure. C'est un calligramme noir, dont les entrelacs de courbes et contre-courbes enserrent les chiffres de 1 à 6. En dessous figure la libre traduction d'un fragment du verset du Coran en partie calligraphié. Les visiteurs peuvent également découvrir l'œuvre d'Ulla Karttunen, une artiste multidisciplinaire de Finlande, qui s'intéresse plus spécialement à la place du fétichisme de la femme dans la société de consommation. Pour rappel le vernissage de l'exposition a été marqué par la performance artistique de Mo' Mohamed Benhadj, intitulée Révérence, l'artiste algérien surprend encore une fois par sa démarche artistique fortement imprégnée de spiritualité. Les mouvements de tout le corps sont hypnotiques, et défient les éclats en fusion de la scie métallique, où les étincelles sont de véritables feux de joie d'un état d'extase. Dans sa performance, Mo' Mohamed Benhadj transgresse la gravité, la douleur du corps et la matière physique pour accéder à la sérénité de l'être dans un état spirituelle qui transcende toutes les lois terrestres pour accéder au divin S. B.