Erdogan estime que cette réforme, qui pourrait lui permettre de rester au pouvoir jusqu'à au moins 2029, est nécessaire pour garantir la stabilité de la Turquie. Des arguments qui sont loin de convaincre les partis d'opposition social-démocrate et pro-kurde qui voient dans ce texte un symbole d'une dérive autoritaire annonciatrice de mauvais lendemains. Dans ce contexte de polarisation politique, qui s'ajoute à un climat sécuritaire dégradé, la campagne pour le référendum s'annonce déjà particulièrement tendue Le Parlement turc a finalement donné son feu vert à une révision constitutionnelle qui pourrait fortement renforcer les pouvoirs du président Recep Tayyip Erdogan, ouvrant la voie à un référendum sur cette proposition au cœur d'une vive critique. Erdogan estime que cette réforme, qui pourrait lui permettre de rester au pouvoir jusqu'à au moins 2029, est nécessaire pour garantir la stabilité à la tête de la Turquie, confrontée à une vague sans précédent d'attentats et des difficultés économiques. Mais le texte suscite l'inquiétude de l'opposition qui accuse le chef de l'Etat turc de dérive autoritaire. Une tendance devenue palpable notamment depuis la tentative de putsch en juillet 2015 qui a été suivie de purges d'une ampleur inédite. La réforme constitutionnelle, composée de 18 articles, permettrait notamment au président de nommer et révoquer les ministres, promulguer des décrets et déclarer l'état d'urgence. Le Parlement a ainsi approuvé en seconde lecture la proposition avec 339 voix sur 550, soit plus que le seuil nécessaire des trois cinquièmes pour soumettre le texte à une consultation populaire qui devrait se tenir au printemps. La victoire parlementaire a été assurée par une alliance formée entre le parti au pouvoir, l'AKP, et le parti de droite nationaliste, le MHP. Selon la majorité, la présidentialisation du système est nécessaire pour assurer la stabilité au sommet de l'Etat et permettra de s'aligner sur les systèmes en vigueur dans d'autres pays, «comme aux Etats-Unis ou en France». Le Premier ministre turc Binali Yildirim, a ainsi assuré que le projet profiterait à tous, en permettant un «gain de temps» pour la gestion du pays. Mais ces arguments récurrents sont loin de convaincre les partis d'opposition social-démocrate et pro-kurde qui voient dans ce texte un symbole d'une dérive autoritaire annonciatrice de mauvais lendemains. L'examen du texte au Parlement a déchaîné les passions et donné lieu à des empoignades d'une rare violence à l'hémicycle, où un député a eu le nez cassé et une élue handicapée a été projetée au sol. Dans ce contexte de polarisation politique, qui s'ajoute à un climat sécuritaire dégradé, la campagne pour le référendum s'annonce déjà particulièrement tendue. Cette controversée réforme constitutionnelle permettra au président d'être élu deux fois pour cinq ans, et se représenter une nouvelle fois si des élections législatives sont convoquées pendant son second mandat. Le compteur d'Erdogan, élu en 2014 à la présidence après 12 ans à la tête du gouvernement, pourrait être remis à zéro avec cette réforme. Il pourrait ainsi rester au pouvoir jusqu'à au moins 2029, le prochain scrutin étant fixé à novembre 2019. Avec cette réforme, la fonction de Premier ministre disparaîtrait, au profit d'un ou plusieurs vice-présidents. Le président pourra également dissoudre le Parlement et intervenir dans le domaine judiciaire. R. I.