Le vase de l'irresponsabilité ou de l'inconscience d'une partie de la presse algérienne, qui agit en relais actif des noircisseurs de l'image de l'Algérie, était plein depuis un certain temps. Il a même assez débordé pour faire sortir le ministère des Affaires étrangères de sa réserve habituelle, pour dire, en termes diplomatiques, qu'il «regrette» de voir certains titres de la presse «amplifier des appréciations tendancieuses sur l'Algérie». La presse pointée ainsi du doigt réprobateur est celle-là même qui reprend, souvent en «Une» et avec moult commentaires à l'appui, des «propos attribués à des personnes connues ou même anonymes» en France ou aux Etats-Unis, ainsi que des «études prétendument académiques et autres matières médiatiques», dont la finalité est «d'amplifier des appréciations spéculatives et tendancieuses sur la situation en Algérie et ses perspectives». Ces titres jouent donc un rôle de relais actif de dénigreurs étrangers de l'Algérie, volontairement, involontairement ou à «l'insu de leur plein gré», pour reprendre la célèbre formule d'un cycliste français tricheur et menteur. Et ils campent ce rôle d'adeptes du tableau le plus sombre, en dépit du fait que les appréciations relayées «soient sourcées en France, aux Etats-Unis ou dans tout autre pays, et qu'elles se prévalent de scientificité ou s'apparentent à la cartomancie». Mais dans tous les cas de figure, ces supplétifs médiatiques des Cassandre étrangers, relaient, en les agrandissant et les grossissant, des «manifestations de subjectivité et des stéréotypes qui sont surabondamment véhiculés et fréquemment recyclés pour déformer les réalités actuelles et les perspectives de l'Algérie». Pour le MAE, «lesdites expressions publiques d'opinions étrangères n'acquièrent évidemment pas d'autorité particulière ni en tant que telles, ni du fait du pays ou de l'institution avec qui elles s'emploient à paraître associées». Autrement dit, tout ce qui émane de l'étranger comme point de vue est forcément juste, nécessairement crédible et pertinent par principe. C'est là donc une appréciation essentialiste d'analyses d'experts en tout genre, qui ne font pas toujours autorité en leurs domaines d'expertise respectifs. Mais puisque c'est un étranger qui pense, qui expertise et «prospectivise», c'est donc bon à prendre. C'est d'autant plus bon à prendre, que ces journaux opposants par principe au pouvoir en place, ont tendance à confondre pouvoir, Etat, régime, image de marque du pays, sa diplomatie et la défense de ses intérêts stratégiques à l'étranger. Ces mêmes forces d'appui médiatiques à certaines boîtes d'intelligence étrangères, auraient pourtant gagné en lucidité si elles s'étaient données la peine de constater qu'aucune presse étrangère, sous toutes les latitudes, ne relaye des points de vue étrangers qui assombrissent régulièrement les réalités et l'image de leurs pays. A l'opposé, on a même vu chez nous, des journaux trop pressés d'éreinter le pouvoir en place, faire leurs choux gras, en «Une» d'une note rédigée par deux obscurs politologues américains appartenant à un Institut d'études lié à bien des égards au lobby sioniste le plus influent des USA. Et ces mêmes journaux de titrer, cinq colonnes à la «Une», sur la base de cette même note, que le «régime est menacé dans ses fondements». Cette note, censée être pour nos relayeurs médiatiques éblouis un exemple parfait de sagacité politique, est pourtant un condensé de clichés, d'approximations et de plans tirés sur la comète à partir du petit doigt qui analyse ! C'est précisément un copié-collé des habituels considérations sur les fluctuations du prix du pétrole, l'état de santé du président Abdelaziz Bouteflika, les sempiternelles et mystérieuses intrigues du sérail autour des incertitudes de la succession. Ces mêmes frères Dalton de la presse relayeuse de la phosphorescence géostratégique américaine ou française, avaient fait également leur miel éditorial du rapport parlementaire du duo de Pieds-Nickelés français Teissier-Glavany. Comme dans le cas de la note américaine, le rapport des deux parlementaires français pour lequel Jean Glavany a fait après de plates excuses à l'Algérie, plante un décor digne du film Mad Max ! Et à voir la manière avec laquelle nos relayeurs journalistiques présentent le jus de méninges américain ou français, on a l'impression qu'ils sont adeptes de l'adage «tout ce qui rentre fait ventre» ! On reprend alors les notes et autres rapports ou études, sans même prendre le soin de présenter leurs auteurs et surtout d'éclairer leurs lecteurs au sujet de la nature, des liens, des financements et des différentes accointances de ses boîtes d'intelligence qui n'est pas toujours comprise au sens anglo-saxon du terme. Ils oublient même de signaler, par exemple, que les deux auteurs de la note américaine en question, en l'occurrence Robert Satloff et Sarah Feuer sont allés d'abord au makhzenien Centre marocain des études stratégiques (CMES) dirigé à Rabat par Mohammed Benhammou, expert international sur les questions de sécurité et de terrorisme. Les deux analystes US se sont donc rendus à Rabat pour animer un débat sur le thème : «Le Président Trump, le Maroc et le Moyen-Orient : défis et opportunités». En vérité, ils y sont allés pour mieux préparer leur note sur l'Algérie. Le journal gouvernemental Le Matin du Sahara et du Maghreb rapporte d'ailleurs que «Sarah Feuer a beaucoup insisté sur l'Algérie et les risques que pourrait générer l'après-Bouteflika, le Président algérien étant gravement malade ; Cette situation est aggravée par la crise économique consécutive à la baisse des prix du pétrole». Et nos mêmes journaux algériens ne disent rien à leurs lecteurs au sujet du très discret Washington Institute for Near East Policy (WINEP), l'employeur de Robert Satloff et Sarah Feuer. Cet institut dont Denis Ross, l'envoyé spécial de l'ONU dans le dossier du Sahara Occidental est conseiller, est un think tank assez discret et pour cause ! Ses liens avec le principal lobby pro-israélien The American Israel Public Affairs Committee (AIPAC), sont aujourd'hui un secret de Polichinelle. L'AIPAC contrôle la présidence, la direction exécutive et la trésorerie de l'Institut dont le fondateur est membre de la présidence du Jewish Federation Council de Los Angeles. Selon des précisions précieuses de Saoudi Abdelaziz, un historique du PAGS algérien et qui assure en France une veille technologique rigoureuse et vigilante à travers un blog de revues de presse analytique, le WINEP compte parmi ses membres, Martin Indyk, directeur exécutif qui a entamé sa carrière comme directeur de recherche à l'AIPAC. Il y a aussi Walter P. Stern, secrétaire-trésorier et président new-yorkais du Committee on Freedom of Trade with Israel, member de la Anti-Defamation League of B'nai B'rith, liée à l'American Jewish Committee. N. K.